Né en Tunisie, Abdellatif Kechiche arrive avec ses parents à Nice à 6 ans. Passionné de théâtre, il suit les cours d'art dramatique du Conservatoire d'Antibes. Il interprète plusieurs spectacles sur la Côte d'Azur, notamment une pièce de Federico Garcia Lorca en 1978 et une pièce d'Eduardo Manet l'année suivante. Il se consacre également à la mise en scène et présente au Festival d'Avignon L'Architecte en 1981.
Au cinéma, il obtient le premier rôle du Thé à la menthe d'Abdelkrim Bahloul, où il joue un jeune immigré algérien condamné à vivre de petits larcins.
André Téchiné l'engage en 1987 dans Les Innocents où il incarne un gigolo face à
Sandrine Bonnaire et
Jean-Claude Brialy. Grâce à
Bezness de
Nouri Bouzid, il obtient le Prix d'interprétation masculine du Festival de Namur en 1992.
Abdellatif Kechiche décide ensuite de passer derrière la caméra. Il écrit plusieurs scénarios qu'il tente de vendre sans succès. Mais le script de La Faute à Voltaire finit par séduire le producteur Jean-François Lepetit. Ce premier film se conçoit comme le portrait, simple et vibrant, d'un sans-papiers. Le jeune réalisateur y révèle sa capacité à observer la réalité quotidienne de déshérités ou de marginaux tout en développant un certain sens du romanesque et de la péripétie. On y décèle également son amour des acteurs et du jeu naturaliste grâce aux interprétations de
Sami Bouajila et
Aure Atika. L'ensemble de ces qualités lui vaut le Lion d'or de la meilleure première oeuvre à la Mostra de Venise en 2000.
En 2003, Kechiche écrit et réalise L'Esquive avec des acteurs débutants et un budget extrêmement réduit. Il y suit une bande de lycéens de la banlieue parisienne répétant une pièce de Marivaux pour la classe de français. Cette oeuvre sincère, qui cherche à rendre compte du mouvement hésitant et assez peu intime de la séduction adolescente, brise les stéréotypes sur la jeunesse des cités. Malgré un succès confidentiel en salles, il est salué comme l'un des grands films français de l'année 2004 par la critique. À la surprise générale, il détrône à la 30e cérémonie des Césars les deux films favoris du public :
Les Choristes de
Christophe Barratier et Un long dimanche de fiançailles de
Jean-Pierre Jeunet en gagnant les 4 trophées de catégories reines : « Meilleur film », « Meilleur réalisateur », « Meilleur scénario » et « Meilleur espoir féminin » pour
Sara Forestier, révélée grâce au rôle de Lydia.
Kechiche met ensuite en scène en 2006
La Graine et le mulet qui évoque le parcours d'un ouvrier d'origine maghrébine désirant se reconvertir dans le métier de restaurateur sur le port de Sète. Dans ce troisième opus, le cinéaste fait à nouveau la démonstration de son talent de peintre du quotidien et de conteur bienveillant. Il reçoit un accueil triomphal à Venise où il se voit décerner le Grand Prix du Jury. La comédienne
Hafsia Herzi décroche de son côté le Prix de la meilleure jeune actrice. Après avoir obtenu le Prix Louis-Delluc 2007, le metteur en scène écarte à nouveau, de manière aussi inattendue que la première fois, trois des grands favoris aux Césars, en 2008 : La Môme d'
Olivier Dahan,
Un secret de
Claude Miller et
Le Scaphandre et le papillon de
Julian Schnabel. La Graine et le mulet gagne en effet les quatre mêmes statuettes que L'Esquive, trois ans auparavant.
Sa nouvelle réalisation, sélectionnée à la Mostra de Venise 2010, s'intitule Vénus noire, en référence à la « Vénus Hottentote » (Saartjie Baartman). Il s'agit du premier film à costume et d'époque de son auteur.