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- Pour l'instant, rien.
Pour une mère comme La Guinguette, le malheur, ça se sent, ça se devine. Félicienne Marquand, surnommée La Guinguette, est inquiète, son fils n'est pas rentré depuis la veille. Avec sa stature impressionnante, elle manie la harpie de sa barque comme un fétu de paille, mais malgré ça, l'angoisse s'installe. Et le malheur arrive avec le garde-champêtre : son fils Paul a été hospitalisé à Lyon. La Guinguette, cette force de la nature, est anéantie devant le cadavre de son fils. Ce n'est pas possible, que s'est-il passé ? Mais cette mère courage n'est pas du genre à se laisser abattre même si les premiers jours elle semble brisée par ce drame.
Ses amis Constance et Honoré Fisboeuf la soutiennent comme ils peuvent. Solidarité des pauvres. Mais que faire devant une telle douleur ? Elle se sent démunie face au système policier, à ce flic Lopez qui a tabassé son fils à mort, face à la complexité de l'appareil judiciaire. L'hommage du village est à la mesure de l'estime que chacun portait à Paul Marquand, engagé dans la vie du village, membre de la société de sauvetage et des joutes nautiques.
Que faire après un tel drame, quand elle se retrouve seule ? La justice, elle y a bien pensé, et même consulté un avocat, mais les juges, les avocats, tout ça c'est un autre univers pour elle, un monde inconnu et intimidant. Comme souvent chez Bernard Clavel, la tragédie se noue, rapide et inexorable. La logique implacable de la violence se développe, s'impose comme unique solution, dénouement libérateur et fatal. Le désespoir l'a emporté, « à présent, elle n'a plus à trembler pour personne. Et elle se dit que c'est bon d'avoir à trembler pour quelqu'un parce que c'est la preuve qu'on a un être à aimer ». Rien ne peut faire dévier La Guinguette de son idée : elle et ce Lopez, l'assassin de son fils, seront unis par la mort, lestés par les énormes gueuses de fonte, au fond de ce Rhône qu'elle aimait tant.