Agnès Capri est issue d'une famille juive qui a fui la Révolution Russe. Adolescente, elle prend d'abord des cours d'art dramatique chez
Charles Dullin et
Louis Jouvet, et s'initie au chant dès l'âge de seize ans à la célèbre Schola Cantorum.
Imprégnée d'idées révolutionnaires, elle devient membre de l'Association des Artistes et Écrivains Révolutionnaires (AAER) et fréquente à cette occasion Paul Nizan, Louis Aragon,Jacques Prévert et Max Ernst. Elle se constitue alors un répertoire en puisant dans les textes d'auteurs sulfureux ou d'avant garde : Jacques Prévert, qu'elle a rencontré au groupe Octobre,
Raymond Queneau, Robert Desnos, Paul Éluard, Henri Michaux, Apollinaire ou Léon-Paul Fargue.
Elle rencontre à 22 ans en 1929, Georges Pomiès dont elle tombe amoureuse et dont elle devient une admiratrice farouche.
En 1935, elle se lance dans la chanson au Boeuf sur le toit, cabaret ouvert à l'initiative de
Jean Cocteau, où elle interprète les premières compositions de Jacques Prévert. Le succès est immédiat et le tout Paris se précipite pour écouter cette jeune femme dont la voix et le répertoire sont très vite reconnus.
Dans la foulée, Agnès Capri est programmée à l'A.B.C (où elle fait scandale le jour de Pâques pour avoir récité le poème de Jacques Prévert Pater Noster (Notre Père qui êtes aux cieux, restez-y !). Elle est soutenue à cette époque par Charles Trenet qui dans les salles où elle se produit, réclame les textes que la direction veut lui supprimer !
Elle se produit également sur la scène de l'Opéra bouffe, avant d'ouvrir, en 1938, son propre lieu, Le Capricorne (Chez Agnès Capri), rue Molière à Paris. C'est dans cet endroit révolutionnaire qu'elle retrouve plusieurs artistes surréalistes et amis du groupe Octobre comme Jacques Prévert, Michel Vaucaire,
Joseph Kosma ou encore
Erik Satie. C'est à cette époque qu'elle enregistre ses premiers disques chez Pathé-Marconi.
L'arrivée de la guerre la contraint à fermer Le Capricorne (elle est d'origine Juive) et faute de pouvoir chanter en zone libre, elle quitte Paris pour se réfugier en Algérie où elle présente des spectacles de chansonniers et anime les spectacles de l'Opéra d'Alger avec l'aide de Jacques Canetti, grand découvreur de talents qui travaillera plus tard pour Philips avant de fonder son propre Label (Jacques Canetti présente).
Elle revient à Paris en 1944, et prend en 1945 la direction du théâtre de La Gaîté Montparnasse auquel elle donne le nom de Théâtre Agnès Capri. Elle y reste jusqu'en 1949, date à laquelle elle réinstalle son cabaret (Chez Agnès Capri, rue Molière) où se produiront entre autres
Germaine Montero dans son répertoire espagnol, Jean Sablon,
Catherine Sauvage, Cora Vaucaire, Mouloudji,
Serge Reggiani,
Juliette Greco, Marc Ogeret, Pierre Louki, qui y chante, entre autres, "La Môme aux Boutons", Georges Moustaki et les Frères Jacques qui y remportent leurs premiers succès. La concurrence lui impose hélas en 1958 de fermer son cabaret. En 1958, parait un roman de Nicole Louvier, qui a chanté chez Agnès Capri, intitulé "La mort d'un théâtre", dans la collection "Les Oeuvres libres, éditées par Fayard. Cependant, elle continue jusqu'à sa mort sa carrière de chanteuse et comédienne et enseigne son savoir au théâtre de l'Epée de Bois, devient productrice de radio, continue à enregistrer quelques disques et se met à l'écriture.
Elle fréquente L'Écluse après guerre, puis devient femme de radio créant entre autres la fameuse émission le Pays de Papouasie durant le mois d'août 1954, récit de voyage improbable, où de sa voix haut perchée, proche de celle de
Danielle Darrieux ou de Mireille, elle raconte ses découvertes en y insérant des chansons de Prévert, ses propres chansons, des lectures de poèmes ou d'adaptations de poèmes. Elle contribua beaucoup à la reconnaissance de Jean Tardieu et de François Billetdoux.
Agnès Capri, est aussi auteur de nombreuses chansons (« La Grande Opéra », « Laisse parler Jacob ») et peut véritablement être considérée comme l'une des pionnières de la chanson au féminin. Elle fut une des premières interprète de Prévert, sinon la première.
En 1974, elle publie la première partie de ses mémoires Sept épées de mélancolie qui paraissent chez Julliard, et est reçue à l'occasion par Jacques Chancel pour une Radioscopie spéciale Agnès Capri, où elle revient sur son parcours, ses amours, ses rencontres. La seconde partie devait être consacrée à son parcours artistique depuis l'après guerre.