Françoise a deux frères et leur père est un militaire, le général Charles François Gautsch, auquel elle empruntera plus tard l'un de ses prénoms pour en faire son pseudonyme d'artiste.
Elle va, en quelque sorte, réaliser le rêve de comédienne de sa mère. En effet, celle-ci, après avoir suivi, dans sa jeunesse, les cours d'art dramatique du conservatoire de Lyon, débuta sur la scène du Théâtre des Célestins où elle joua même, sous le nom de Jeanine Henry, avec
Charles Vanel. Elle abandonne sa carrière pour épouser le jeune polytechnicien Charles Gautsch et les strictes ambitions de sa belle-famille.
Elle dira un jour à sa petite fille : « Tu dois penser à l'art, la seule chose réellement belle. Si tu n'aimes pas le piano autant que moi, fais de la danse. » Françoise est donc inscrite aux cours de danse à Rabat, au Maroc, où son père est alors en poste au début de la Seconde Guerre mondiale.
Elle fait, vers 7 ans, ses débuts sur les planches en « papillon » du Carnaval de Robert Schumann dans un ballet donné au profit de la Croix-Rouge. Le spectacle sera présenté dans les principales villes marocaines.
La fillette entre ensuite au lycée de Casablanca où la famille a déménagé. Françoise met à présent le tutu pour ses cours de danse. C'est aussi à partir de cette époque qu'elle découvre le cinéma, ses magazines et ses stars qui ont pour noms
Shirley Temple,
Errol Flynn ou
Gary Cooper.
À la fin de la guerre, en 1945, mère, grand-mère et enfants rentrent en France tandis que le père reste au Maroc, retenu par ses obligations professionnelles. Après un passage par Bagnères-de-Bigorre, la famille s'installe dans le 16e arrondissement de Paris.
Françoise entre au lycée Molière et partage sa passion naissante pour la composition française avec ses deux nouvelles amies. L'une est Yvonne Roussel, la soeur de
Michèle Morgan et l'autre Danièle Heymann, future journaliste et fille du réalisateur
Claude Heymann. Les trois amies, entre le lycée et les lectures de Cinémonde, trouvent le temps d'organiser de petites représentations entre elles, le goût de la déclamation leur ayant été inculqué par leur professeur de français.
Un jour, Yvonne Roussel obtient deux places pour assister au Théâtre de l'Empire et dans la loge de sa soeur Michèle Morgan, à la projection du dernier film de celle-ci,
La Symphonie pastorale de
Jean Delannoy (1946). Premier contact de Françoise avec une star.
Si elle s'intéresse au cinéma, le cinéma s'intéresse aussi à elle car, devant cette même salle de L'Empire, elle est abordée, plus tard, par le réalisateur Marc Allégret qui recherche deux jeunes filles pour son prochain film, Les Lauriers sont coupés. Elle est reçue par le jeune assistant d'Allégret,
Roger Vadim qui lui annonce que l'autre jeune fille, une certaine
Brigitte Bardot, est déjà engagée. Ce film ne se fera pas mais le destin veille.
Ayant peu de goût pour les études, Françoise quitte sa classe de seconde et lance à sa mère : « Je veux faire du cinéma. » Sa mère l'inscrit aux cours dramatiques dispensés dans le 9e arrondissement par l'une de ses connaissances, madame Bauer-Thérond. Ses camarades s'appellent Michel Drach,
Roger Carel et
Roger Hanin. Lors d'une audition au Théâtre de la Potinière, elle signe un contrat avec l'agence artistique Besnard et elle rejoint l'équipe de ses poulains, parmi lesquels
Magali Noël et Renée Cosima.
Pressentie par Robert Dhéry qui auditionne pour la comédie théâtrale qu'il est en train de monter avec
Bourvil en vedette, Le Bouillant Achille de Paul Nivoix (1948), le rôle est finalement confié à une autre débutante,
Nicole Courcel. Françoise fait une première figuration en 1948 dans
Rendez-vous de juillet de
Jacques Becker où elle est toujours devancée par Nicole Courcel qui y tient l'un des rôles principaux, mais son tour va bientôt arriver.
Elle va sur ses 18 ans et elle est engagée, après des essais concluants, par Willy Rozier qui lui confie son premier et grand rôle dans L'Épave (1949). Elle est « Perrucha », une belle garce qui, avec quelques scènes déshabillées, lance le personnage de Françoise Arnoul.
Si, dans la réalité, à l'aube des années 1950, les conventions cinématographiques voulaient que les jeunes de 18 ans soient représentés comme très rangés, elle va incarner, à l'écran, des personnages sur le fil du rasoir, des rôles souvent pervers. C'est dans l'air du temps, peut-être la résultante d'une éducation trop rigide qui va faire que le public s'en va vivre au cinéma ses phantasmes par procuration. Cécile Aubry, juste avant, venait de créer, avec succès, son personnage d'ingénue perverse dans
Manon, le film de
Clouzot (1949).
Dans le cas de Françoise Arnoul, même si elle a quelquefois des rôles légers, primesautier comme dans Nous irons à Paris (1950) ou de midinette comme dans
French Cancan (1954), le cinéma la voue à jouer des personnages troubles et destructeurs. On peut citer quelques films aux noms évocateurs : Le Fruit défendu (1952),
La Rage au corps (1954), et surtout la série des films d'
Henri Decoin,
La Chatte (1958 - 1960), où son félin minois d'espionne perdue en ciré noir va affoler les populations. Plus que Brigitte Bardot à laquelle on a voulu quelquefois l'opposer, elle incarne des personnages souvent énigmatiques qui sourdent d'une volupté bien plus pernicieuse et dangereuse. Elle-même dira à Vadim sur le plateau de
Sait-on jamais... (1957) : « Si tu cherches Brigitte à travers moi, tu ne la trouveras pas. Elle n'est pas moi, je ne suis pas elle ! » Elle aura d'ailleurs l'occasion de prouver, avec ce film et celui de
Pierre Kast, La Morte saison des amours (1960), l'étendue de ses possibilités pour marier intellectualisation des sentiments avec passion charnelle.
Françoise Arnoul a connu l'organisateur événementiel Georges Cravenne (décédé le 10 janvier 2009) en 1954 sur le tournage de
French Cancan. Ils se sont mariés en 1956 et ont divorcé en 1964.
Elle a rencontré le cinéaste Bernard Paul en 1964 sur le tournage de Compartiment tueurs de
Costa-Gavras et a été sa compagne jusqu'au décès de celui-ci en 1980. Pour lui, elle a mis sa carrière en sommeil afin de l'assister dans le tournage de ses premiers films. Ensemble et avec
Marina Vlady, ils ont créé, en 1968, la société de production « Francina » qui leur a notamment permis de financer les trois longs métrages de Bernard :
Ces trois films, s'ils sont salués par la critique, ne connaissent qu'une faible audience en salles.
La maturité lui a offert l'occasion de diversifier ses emplois au cinéma et à la télévision. De cette période, on retiendra, au cinéma,
Lucky Jo de
Michel Deville (1964), Le Dimanche de la vie de
Jean Herman (1965) et Ronde de nuit de Jean-Claude Missiaen (1984). À la télévision, elle aura enfin des emplois attendrissants de mères comme dans L'Automate de Jean-François Claire (1981) et elle créera de remarquables compositions comme celle, par exemple, de cette vieille femme vengeresse de L'Étrange histoire d'Émilie Albert de
Claude Boissol (1988).