Haroun Tazieff né à Varsovie en 1914, alors partie de la Russie tsariste, d'un père tatar, né à Yangi-Yer, docteur en médecine, et d'une mère russe, née à Dvinsk qui était chimiste et docteur en sciences politiques. Son père mourut au front dès le début de la Première Guerre mondiale. Avec sa mère, il émigra en Belgique à la fin de 1925 où il résida quelque temps en apatride, avant de partir en France à la fin des années 1927, puis de revenir en Belgique en 1929 et d'y recevoir la nationalité belge en 1936.
Étudiant, footballeur affilié au Daring Club de Bruxelles (Société Royale) (2) de 1930 à 1932 et, en 1935, à Gembloux Sport (2235) pendant ses études à la Faculté Agronomique, mais surtout joueur de rugby qu'il pratiqua en passionné. En 1958, alors qu'il était en expédition au Congo Belge, il adressa un télégramme d'encouragement à l'équipe de France de rugby à XV dont il connaissait certains membres et qui était en tournée en Afrique du Sud. Il fit aussi de la boxe et fut champion de Belgique universitaire, puis, alors qu'il travaillait au Congo Belge, champion du Katanga. Haroun Tazieff avait suivi ses études primaires en Russie et en Belgique. Après ses études secondaires à Bruxelles, il conquit le diplôme d'ingénieur agronome de la Faculté des Sciences Agronomiques de Gembloux. En 1938, il accomplit son service militaire dans l'armée belge et, en 1939, fut mobilisé dans une unité d'élite de l'armée belge, les chasseurs ardennais (pendant que la France était entrée dans la drôle de guerre). Il milita ensuite dans la résistance et parvint malgré tout, en 1944, à conquérir son diplôme d'ingénieur géologue de l'Université de Liège. Après la guerre, alors qu'il travaillait au Congo Belge, il eut l'occasion d'assister à l'éruption des volcans Nyiragongo et Kituro. Ce lui fut une révélation et, dès lors, il se consacra à la volcanologie, inaugurant avec son ami André Delsemme, un astronome qu'il connaissait depuis l'université de Liège, d'audacieuses descentes dans la bouches des volcans pour y effectuer des prélèvements de lave et de gaz. C'est alors qu'il réalisa le film Les Rendez-Vous du Diable. Il devint aussi le compagnon de Jacques-Yves Cousteau sur la Calypso.
Attiré par les offres qui lui étaient faites en France sur le plan scientifique, il se décida à demander la naturalisation qu'il obtint en 1971 et perdit automatiquement la nationalité belge. Cela lui valut de devenir ministre de la prévention des catastrophes dans un gouvernement français en 1981. Dénonçant ce qu'il estimait être les excès de l'écologie politique au détriment d'une étude sérieuse de l' écologie et déçu par la politique politicienne, il retourna à ses recherches. Il exposa celles-ci à l'intention du grand public par un livre qui sera le dernier d'une série de vingt-quatre ouvrages publiés depuis 1951 et dans lequel il combattait le catastrophisme en vogue avec le trou de la couche d'ozone et le Réchauffement climatique, phénomènes qu'il ne niait pas, mais dont il estimait les causes mal analysées et la menace surfaite. Ce livre, il l'intitula par ironie La Terre va-t-elle cesser de tourner ?
Décédé le 2 février 1998, il est enterré au cimetière de Passy à Paris.
Il fut successivement :
- assistant de faculté en entomologie;
- ingénieur aux mines d'étain du Katanga (ex-Congo Belge), en 1945 ;
- géologue au service géologique du Congo belge, l'éruption du Kituro qu'il étudia en 1948, détermina sa passion pour la volcanologie, et il se lança dans l'étude, « sur le vif », de la phénoménologie des éruptions et de leur prévision, et dans la vulgarisation de la volcanologie ;
- chargé de cours à l'Université libre de Bruxelles, en 1957, où il anime le Centre national de volcanologie ;
- chargé de cours à la faculté des sciences de Paris, en 1958, il est nommé directeur du laboratoire de volcanologie de l'Institut de physique du globe de Paris et s'installe en France dès 1953. Il se consacra à une longue série d'expéditions volcanologiques (vallée des Dix mille fumées en Alaska, dépression de l'Afar, Nyiragongo, Erta Ale, mont Erebus, et bien d'autres volcans comme l'Etna, Faial, la Soufrière de la Guadeloupe,...) ;
- chargé de cours à la faculté des sciences d'Orsay ;
- en 1972, maître puis directeur de recherche au CNRS, au laboratoire de volcanologie du Centre des faibles radioactivités de Gif-sur-Yvette qui se spécialisait notamment dans les gaz éruptifs ;
- président du conseil scientifique de l'institut de volcanologie (Rome, Catane, Pise) ;
- responsable du service volcanologique de l'Institut de physique du globe de Paris et responsable de la surveillance de la Montagne Pelée à la Martinique et de la Soufrière à la Guadeloupe de 1973 à 1976 ;
- en 1981, commissaire à l'étude et à la prévention des catastrophes naturelles.
De 1984 à 1986, cet homme de gauche fut secrétaire d'État chargé de la prévention des risques technologiques et naturels majeurs auprès de
Laurent Fabius, Premier ministre de
François Mitterrand. Ce poste de secrétaire d'État sera supprimé dans le gouvernement Chirac en 1986.
Il fut président du Comité supérieur des risques volcaniques de 1988 à 1995, et membre de la société Philomatique et de l'Explorers club de New York. Il obtint le Prix André de Saint-Sauveur de l'Académie des sports en 1971, pour exploit sportif exceptionnel et de caractère original.
Dès 1948, il se lance dans l'étude sur le vif de la phénoménologie des éruptions. Il révèlera l'importance des éruptions sous-marines, qu'il fut le premier à observer, décrire et analyser de 1957 à 1963 aux Açores (Faïal, Capelinhos), expérience reprise lors de la formation de l'île de Surtsey en 1963, en Islande, puis lors de l'exploration de l'Afar (Ethiopie) et en Polynésie. Il fit de même pour les lacs de lave qu'il a découverts (Nyragongo, Erta Ale) et à l'Erebus ainsi que pour les éruptions phréatiques (Indonésie, Afar, Soufrière de la Guadeloupe). Il est l'un des fondateurs de la volcanologie moderne, science dont il s'est fait l'apôtre du développement multidisciplinaire. Les innovations qu'il a apportées, suscitées ou favorisées portaient autant sur les concepts que sur les instruments de mesure, dont plusieurs sont restés des éléments de référence, ou sur les moyens d'accès aux bouches éruptives actives et la méthodologie de la protection des chercheurs de terrain, comme de la prévention des risques pour les populations locales.
Haroun Tazieff fut aussi l'un des pionniers de la validation de la théorie de la tectonique des plaques. A partir de 1967, les expéditions Tazieff en Afar (Ethiopie), ont apporté la démonstration de l'origine océanique des systèmes volcaniques axiaux actifs de la région. Initié dans les années 40 aux travaux de Wegener par son professeur le tectonicien belge Paul Michot, Haroun Tazieff cherchait depuis 1948-49, après sa découverte du volcanisme dans la branche sud-occidentale du grand rift africain dans le Kivu, à en explorer la partie septentrionale, qu'il ne put explorer qu'en 1967, après plusieurs tentatives avortées. Les travaux de recherche décrivant les mécanismes d'expansion en Afar se sont poursuivis de 1967 à 1976, donnant lieu à une multitudes de publications. Franco Barberi et Jacques Varet, prenant le relais d' Haroun Tazieff et de Giorgio Marinelli, se sont vu décerner le Prix L.R. Wager par la Royal Society et l'Asscociation Internationale de Volcanologie et de Chimie de l'Intérieur de la Terre (AIVCIT, 1972).
Tazieff et ses équipiers ont réalisé en Afar les premières mesures directes d'écartement des lèvres d'un rift océanique. Si l'ouverture augmente de 2cm en moyenne par an, il s'agit en réalité d'une succession d'ouvertures brutales de segments actifs, à compter en mètres sur des espaces de temps de l'ordre de 100 ans. Les événements récents mesurés par interférométrie sur images satellites le long de la chaîne axiale de Manda Harraro sont venus confirmer ce type de phénomène en 2006.
L'apport de Barberi et Varet a été de démontrer que les chaines volcaniques axiales de l'Afar étaient de type océaniques (au plan tectonique et magmatique) et assuraient le relais entre les vallées axiales de la Mer Rouge et celles du Golfe d'Aden. De sorte que la frontière des plaques entre l'Afrique et l'Arabie ne passe pas « en mer » par le détroit de Bab-el-Mandeb, mais à terre à travers l'Afar. La nature de la tectonique et du volcanisme de l'Afar se distingue ainsi de celle du rift africain, qui reste un « rift continental » n'ayant pas donné lieu à la génération de croute océanique nouvelle.