Marcel Mangel passe son enfance à
Strasbourg jusqu'à l'âge de 15 ans. Il fait ses études au lycée Fustel de Coulanges (à côté de la cathédrale Notre-Dame de Strasbourg), où, selon son professeur de français, il était le meilleur élève en récitation. Sa famille d'origine juive polonaise est contrainte, après l'invasion allemande, de quitter son domicile pour Périgueux et il poursuit ses études au Lycée Gay-Lussac de Limoges. Son père, un boucher casher, est arrêté en 1944 par la Gestapo et assassiné à Auschwitz. Sous l'influence de son cousin germain Georges Loinger, Marcel rejoint la Résistance en 1942 à Limoges. C'est alors qu'il prend le pseudonyme de Marceau. Il raconte l'avoir « pris dans la Résistance à cause du vers de Victor Hugo, dans Les Châtiments : « Et Joubert sur l'Adige/ Et Marceau sur le Rhin. » J'étais né dans le Bas-Rhin et je voulais bouter les Allemands hors de France ». Dans l'armée française de la Libération, grâce à son excellente maitrise de l'anglais, il devient agent de liaison avec l'armée du général Patton.
Après avoir fréquenté l'École nationale des arts décoratifs de Limoges, qui lui laisse le goût du dessin et de la peinture qu'il pratique régulièrement, Marcel Marceau devient l'élève de
Charles Dullin, de
Jean-Louis Barrault et d'Étienne Decroux, qui établit la « grammaire » de l'art du mime qu'il appelait la « statuaire mobile ».
Son art du mime ou plutôt du « mimodrame » consiste à donner forme à ses pensées (tragiques) au travers des gestes. « La parole n'est pas nécessaire pour exprimer ce qu'on a sur le coeur ». Le 22 mars 1947, jour du 24e anniversaire de l'artiste, sort de l'ombre des coulisses un drôle de personnage, pierrot lunaire, « hurluberlu blafard » à l'oeil charbonneux et à la bouche déchirée d'un trait rouge, un drôle de haut-de-forme sur la tête, une fleur rouge tremblotante servant de panache à ce Don Quichotte dégingandé partant en croisade contre les moulins à vent de l'existence : Bip était né, aussi indissociable de Marcel Marceau que le personnage Charlot de Chaplin. Bip est un être sensible et poétique, inspiré de Deburau, de Charlie Chaplin et du personnage de Pip du roman De grandes espérances de Charles Dickens, qui lui permet d'explorer la vie et la société moderne et de mettre en lumière leur côté tragique. « Bip est un personnage intemporel, tout en étant proche de mes rêves d'enfants. Il se cogne à la vie qui est à la fois un grand cirque et un grand mystère, et j'aime à dire qu'il finit toujours vaincu, mais toujours vainqueur...Il est tout ensemble l'homme de la rue, un vagabond du quotidien et l'homme universel affrontant le tragi-comique de l'existence... Il est l'homme tout simplement, se montrant dans la nudité et la fragilité de son être.».
En 1947, il fonde sa propre compagnie (Compagnie Marcel Marceau), la seule compagnie de mime existant dans le monde, et inscrit au répertoire des mimodrames et des pantomimes (Le Manteau, d'après Gogol, Le Joueur de flûte, Exercices de style, Le Matador, Le Petit Cirque, Paris qui rit, Paris qui pleure).
En 1952, il engage dans sa compagnie Pierre Verry, élève avec lui d'Étienne Decroux, qui sera son partenaire attitré jusqu'en 1979. Pierre Verry accompagne Marcel Marceau en tournée dans le monde entier, présentant ses numéros par ses célèbres pancartes. Adriano Sinivia le remplacera en 1980 à l'occasion de l'inauguration de la biennale de Venise à la Fenice. De 1969 à 1971, Marcel Marceau fonde et dirige à Paris la première école internationale de mime.
Il rencontre et engage à cette époque
Alejandro Jodorowsky, artiste chilien qui utilisait déjà le mime dans son premier film Fando et Lis.
Le mime Marceau devient au fil des années un des artistes français les plus connus dans le monde, notamment grâce à ses tournées aux États-Unis où il crée une vraie révolution théâtrale dans les années 1950, avec notamment son mouvement de la « marche contre le vent », à l'origine du moonwalk de
Michael Jackson.
Il poursuit son oeuvre gestuelle à travers les plus grandes scènes du monde. En 1975, il joue dans la Cour d'honneur du Palais des papes pour le Festival d'Avignon. Il crée en 1978 une école de mime à Paris, où il enseigne afin d'assurer la relève. C'était l'école internationale de mimodrame pour perpétuer la « grammaire » réinventée par Étienne Decroux et cinquante années d'expérience de mime.
Marié trois fois et père de quatre enfants, Marcel Marceau meurt le 22 septembre 2007 à Cahors. Il est inhumé à Paris au cimetière du Père-Lachaise.