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Micro-critique star (nibab_lacsap) :
nibab_lacsap
(à propos de La Cousine Angélique)
“ L'interchangeabilité des personnes renforce l'immuabilité des émotions/stigmates du passé, et l'idée qu'on a tous les âges à tous les âges. ”
— nibab_lacsap
31 janvier 2022
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georges.b1(à propos de La Cousine Angelique)“ Voyage dans le passé‚ la guerre civile‚ la peur‚ les doutes‚ les premières amours‚ le catholicisme‚ avec le regard politique de la maturité. ” — georges.b1 11 avril 2018
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nibab_lacsap(à propos de La Cousine Angélique)“ L'interchangeabilité des personnes renforce l'immuabilité des émotions/stigmates du passé, et l'idée qu'on a tous les âges à tous les âges. ” — nibab_lacsap 31 janvier 2022
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rere15(à propos de La Cousine Angélique)“ L'adulte qui se souvient de son enfance et l'enfant dont l'adulte se souvient joués par le même acteur? Génial et...enfantin. ” — rere15 19 juin 2019
Que la jeune fille du passé soit jouée par la même comédienne que celle qui joue la jeune fille d'aujourd'hui, c'est-à-dire la fille de la jeune fille du passé. Qu'il en soit de même pour les autres personnages : la même comédienne jouant la jeune fille du passé devenue adulte et la mère de la jeune fille dans le passé, etc, il y a de quoi en perdre son latin.
Et ça a pour conséquence de dédoubler chacun des personnages et de nous plonger dans l'impressionnisme d'une réminiscence proustienne, auteur cité ouvertement dans le film. Saura s'attache donc aux impressions plutôt qu'à la psychologie, aux inconscients plutôt qu'à la mémoire historique.
Il est un fait remarquable néanmoins - et c'est l'aspect que l'on retient le plus du dispositif : le seul qui ne soit pas précisément dédoublé c'est bien sûr le héros qui revit dans son corps d'adulte ses souvenirs (flash-back) d'enfance.
De l’impressionnisme on passe alors au surréalisme en voyant ces scènes où ce vieux monsieur à quatre pattes joue aux petites voitures ou converse amoureusement avec sa toute jeune cousine...
Cette absence de la double figure du héros crée un champ aveugle. Son visage d'enfant nous est interdit, invisible, comme un angle mort. Et pour le héros, comme pour nous spectateurs, il s'agit du nœud inconscient de sa quête : quel était mon visage ? mon rôle ? mon identité ? quels sont-ils encore aujourd'hui ? Et cette indétermination génère l’introspection surréaliste du film.
La puissance visuelle que provoque ces situations dissonantes (un adulte en lieu et place d'un enfant) atteint son paroxysme et sa pleine symbolique dans la dernière séquence. Puni pour un semblant de résistance aux militaires franquistes, Luisito est sévèrement châtié par son oncle à coup de ceinture sous l’œil inquisiteur (regard caméra) de sa tante et la larme retenue de sa cousine : une scène annonciatrice de ce que la dictature fera endurer pendant 36 ans au pays. Mais ce que son dispositif fait apparaître c’est un redoublement sordide de la parabole, car ce que l'on voit concrètement ce n'est pas un parent qui corrige violemment un enfant, mais un adulte qui torture impunément un autre adulte.
Et soudain la madeleine de Proust se mue en traumatisme, les faux stigmates d’une vierge de théâtre en profonde cicatrice de tout un peuple.
Le film peut donc s’évanouir dans cette image immuable du passé sans revenir au présent du récit.
Magistral et glaçant.