Quand Jean Marais a quatre ans, sa mère alsacienne décide de partir à Paris avec ses deux fils. Elle sera souvent absente. Le petit Jean lui écrit des lettres mais c'est sa tante qui inscrit l'adresse sur l'enveloppe. Il comprendra plus tard que c'était parce que sa mère, kleptomane, effectuait des séjours en prison. Il fut élève au lycée Condorcet. Jean Marais ne reverra son père, un normand, vétérinaire en province, que près de 40 ans plus tard, sans être sûr qu'il soit bien son père.
Il a un fils adoptif, Serge.
Il fait de la figuration dès 1933 dans les films de Marcel L'Herbier, qui ne lui donnera jamais sa chance. En 1937, il échoue au concours d'entrée au Conservatoire et étudie chez
Charles Dullin, au Théâtre de l'Atelier. Il y découvre les pièces classiques, où il tient des rôles de figuration qui lui permettent de financer ses cours.
Sa rencontre avec
Jean Cocteau en 1937, lors d'une audition pour la mise en scène de sa réécriture d'OEdipe Roi, marque le véritable lancement de sa carrière. Le cinéaste et dramaturge tombe amoureux du jeune acteur, qui sera son amant jusqu'à sa mort en 1963. Cocteau donne à Jean Marais un rôle muet dans OEdipe Roi : Jean Marais y joue le rôle du Choeur. Il lui écrit rapidement une pièce sur mesure :
Les Parents terribles (1938), qui lui donne la reconnaissance de la profession.
1942 le voit aux côtés de Viviane Romance dans l'adaptation par Christian-Jaque de Carmen.
En 1943, il joue un Tristan moderne dans L'Éternel Retour de
Jean Delannoy. Il a une vive altercation avec le critique artistique Alain Laubreaux, du journal collaborationniste Je suis partout, qui l'avait qualifié de "L'homme au Cocteau entre les dents" (cette altercation a d'ailleurs été reprise dans le Dernier Métro de François Truffaut) et ne doit son salut qu'aux hautes relations de Cocteau. Il devient l'idole de sa génération.
En 1944, il monte Renaud et Armide, mais la pièce est victime d'une cabale, semble-t-il menée par les collaborationnistes, et s'arrête très vite. Marais gagne encore en popularité et devient un symbole de résistance à l'occupant.
Après la libération de Paris, en août 1944, Jean Marais s'engage dans l'armée française et rejoint la 2ème DB du général Leclerc.
A la fin de la seconde guerre mondiale, Cocteau écrit pour lui La belle et la bête, un film très difficile à tourner, et auquel personne ne croyait. Marais entre alors dans la légende. En 1946, il joue dans la pièce L'Aigle à deux têtes de Cocteau, puis en 1949, dans l'un des plus célèbres films de Jean Cocteau, Orphée.
À la fin des années 1940, il entre à la Comédie-Française. Il y est à la fois comédien, metteur en scène et décorateur. C'est la première fois qu'une telle fonction est donnée à un aussi jeune comédien (il a moins de 40 ans). Marais quitte le Français après une altercation avec le directeur.
Il tourne auprès des plus grandes vedettes féminines : Les chouans avec Madeleine Robinson, Ruy Blas avec Danielle Darrieux, Aux yeux du souvenir où il retrouve Jean Delannoy avec Michèle Morgan.
Dans les années 1950, il s'éloigne de Cocteau.
Il tourne pour de grands cinéastes dont
Luchino Visconti,
Jean Renoir,
Sacha Guitry.
1954 est l'année de son plus grand succès en salles avec Le comte de Monte Cristo seconde adaptation par Robert Vernay du roman d'Alexandre Dumas.
En 1959, il tourne une dernière fois avec Cocteau, Le Testament d'Orphée dans lequel il joue OEdipe. Marais a quitté Cocteau pour un danseur. Jean Cocteau décède en 1963.
Il partage en 1956 avec Ingrid Bergman la vedette d'Elena et les hommes de Jean Renoir.
Luchino Visconti l'engage en 1957 pour Nuits blanches.
En 1959, André Hunebelle lui propose de tourner Le Bossu avec Bourvil. C'est le début d'une nouvelle carrière. Il était déjà populaire, ces films moins intellectuels que les précédents lui amènent un nouveau public.
Il tourne Le Capitan toujours avec Bourvil et André Hunebelle puis une série de films de cape et d'épée comme
Le capitaine Fracasse en 1961 ou encore
Le Masque de Fer d'Henri Decoin en 1962.
Il connaît un nouveau succès avec la série des Fantômas (1964-1966) dans lesquels il joue le double rôle du journaliste Fandor et de Fantômas, mais bien que le public afflue dans les salles et que le nombre d'entrées s'envole, Marais estime que ces films n'ont plus le prestige des précédents. De plus, après avoir dû partager la vedette avec Bourvil, le voilà désormais presque relégué au rang de premier second rôle par Louis de Funès, qui interprète le rôle du commissaire Juve. Il décide alors que le cinéma est fini pour lui, il se retire au théâtre.
En 1970,
Jacques Demy lui donne son dernier grand rôle dans Peau d'âne.
En 1973, il retrouve le succès pour sa dernière collaboration avec André Hunebelle dans Joseph Balsamo . Il aura tourné huit fois sous la direction d'André Hunebelle.
Jean Marais se retire à Vallauris où il pratique la poterie, la sculpture et le théâtre. Il y ouvre un magasin et même une galerie d'art grâce à un couple d'amis potiers.
Vers 1980, il monte le spectacle Cocteau Marais et devient le gardien de l'oeuvre de Cocteau, sans en avoir légalement les droits.
Au cours des années 1980, il joue au théâtre (Don Diègue dans Le Cid, Le Roi Lear, Les Monstres sacrés) et quelques rôles au cinéma (dans Parking de
Jacques Demy et dans Les Misérables du XXe siècle de
Claude Lelouch). Il jouera son dernier rôle au cinéma dans Beauté volée de
Bernardo Bertolucci en 1995, et au théâtre en 1997, celui du berger Balthazar dans L'Arlésienne, aux Folies Bergère.
Dans une interview donnée à Bernard Pivot, Jean Marais a précisé n'avoir jamais fait de figuration dans Drôle de drame et avoir été remplacé à la dernière minute.
Il écrit quelques livres : ses Mémoires, L'inconcevable Jean Cocteau, des contes et des poèmes.
Comme sculpteur, il a réalisé (entre autres) une évocation du Passe Murailles qui a été installée à Montmartre devant la maison où habitait
Marcel Aymé, auteur de la nouvelle éponyme.
Jean Marais meurt à Cannes le 8 novembre 1998. Il est enterré dans le petit cimetière de Vallauris, la ville des potiers, où il a passé les dernières années de sa vie.