French Touch

Venise 2011 : Si j'aurais su j'aurais pas venu

Festival / Récompenses | Par Chris Beney, Hendy Bicaise | Le 7 septembre 2011 à 16h38

Nous, français, sommes réputés pour être de bons amants, pour se doucher une fois l'an et pour faire la grève à tout bout de champ. Il y a forcément un fond de vérité dans chacun de ces stéréotypes, en particulier pour le premier. Une certitude, en revanche, c'est que l'on est grincheux.

Quand, en plus d'être français, on est critique de cinéma, le verdict est sans appel : personne au monde ne râle plus que nous. Avec ce qu'il faut de mauvaise foi et d'aigreur, essayons de battre ici même le record du Monde de "ronchonceté" actuellement détenu par l'un de nos compatriotes :


La Majorité extrait de Cuisine et dépendances

Depuis que les signes "supérieur à" et "inférieur à" ont été inventés, la vie est beaucoup plus simple. Celle-ci est devenue profondément binaire : soit c'est mieux, soit c'est pire. Basta. Alors si par exemple on applique ça aux deux plus illustres festivals internationaux de cinéma, eh bien : Venise < Cannes. Un verdict clair et efficace.

Du point de vue de la programmation, les sélections sont fluctuantes? En terme d'organisation, par contre, les français mettent une raclée aux italiens chaque année. Comprenez donc qu'être un critique français n'offre pas seulement le leadership de la "ronchonceté" mais s'accompagne aussi naturellement d'un chauvinisme exacerbé. Dès les premiers contacts avec les agents de sécurité qui gravitent autour du Palais des festivals, les italiens nous déçoivent grandement : aucun d'eux ne parle couramment français et anglais. La comparaison avec leurs homologues cannois est sans appel puisque, eux, s'expriment dans un français impeccable.

La première conversation avec l'un des "contrôleurs" de la Mostra est un désastre. Enjoués et courtois, comme toujours, nous lui demandons simplement : « Donde esta la sala del cinéma, per favori ? ». Le molosse velu et gominé, aux faux airs de Luca Brasi dans Le Parrain, reste bouche-bée quelques instants comme si la question n'était pas assez claire. Puis il daigne répondre : « Mmm? La sala de cinema ? You go left, left, then right, left, you walk two hour, you take boat, ok ? ». Okay, mais quelle ne fut pas notre stupeur de découvrir au bout d'une heure que la salle escomptée n'était qu'à dix mètres de notre point de départ !

Une fois repérée, la salle de projection n'est pas forcément simple d'accès pour autant. Petit détail architectural réjouissant : parmi les six salles présentes sur le Lido, deux d'entre elles sont accessibles via le même escalier. Pas évident de s'y retrouver quand deux projos sont programmées à la même heure. Arrivés enfin dans la bonne salle, en jetant un coup d'oeil au programme, nous découvrons avec horreur qu'il s'en est fallu de peu que l'on manque Le Petit poucet pour nous retrouver devant un film italien hors-compétition. Nous gardons malgré tout une confiance totale envers les organisateurs du festival et osons croire que le pire est derrière nous. Erreur. Dans le noir, face aux films, nos attentes de spectateurs un tantinet maniaque sont encore ébranlées.

Pour le plaisir, dressons une petite liste de tous les griefs accumulées à ce jour :

  • les films débutent en retard
  • des spectateurs sont autorisés à entrer et se placent juste devant vous au bout de 30 à 45 minutes de film
  • le son saute pendant des séquences entières
  • les enceintes grésillent tout du long
  • les ouvreurs piaillent et couvrent parfois des dialogues entiers
  • quand ce n'est pas la sirène d'une ambulance qui détone pendant un film d'époque?

Force est de constater que même le responsable en pré-retraite du Cinéma Roberto Baggio de Gnocchi-al-Pesto (petit ciné balnéaire sur les bords de l'Adriatique) gère mieux ses salles...

Là, on se rend compte que c'était une erreur d'énumérer toutes ces failles. Bravo, maintenant l'envie nous prend de tout arrêter. En rentrant à l'appartement, nous tombons sur un vidéo-club, un "Video Futuri" ou quelque chose comme ça, et l'on se demande si l'on ne serait pas mieux devant la télé. Et quitte à regarder le petit écran, pourquoi ne pas essayer de trouver une rediffusion de L'amour est dans le pré ? Mais qu'est-ce qu'il nous arrive ? On veut bien être français ET critique, mais là c'est du délire !

Il suffit heureusement à la moitié d'entre nous d'être cueillis par Himizu, le film de Sono Sion sur l'après-Fukushima qu'il abhorrait pourtant depuis plus d'une heure, pour se sentir de nouveau ravi d'avoir fait le voyage. Quelques heures plus tard, il suffit à l'autre moitié de se plonger dans les paysages envoutants des Hauts de Hurlevent d'Andrea Arnold (Fish Tank) pour clamer haut et fort son plaisir de vivre la Mostra 2011. Enfin, pas trop fort? On ne voudrait pas salir notre réputation !


Qu'est ce qui y a ? extrait de Un Air de famille

Pour suivre toute la Mostra de Venise 2011
Chris & Hendy, nos envoyés spéciaux à Venise 2011

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