Venise 2011 : Carnage en plein air
Ayant survécu à la rencontre nocturne avec nos colocataires, il est temps de passer aux choses sérieuses : voir des films. Première soirée, premier défi : l'ultime chance qui s'offre à nous de découvrir Carnage de Roman Polanski est une projection en plein air à l'autre bout de Venise. Les doutes s'immiscent quant au succès de notre expédition : aller voir un huis-clos en plein air? ça ne tourne pas rond.
Un plan qui ne doit pas tomber à l'eau...
Il nous faut donc mettre toutes les chances de notre côté pour ne pas manquer Carnage. Trois heures avant la séance : montée à bord d'un vaporetto, ces fameux petits bateaux vénitiens nettement plus tendances que nos autobus, puis direction l'Arena di Campo San Polo. Un doigté sur l'iPad et notre chemin s'affiche à l'écran.
C'est pas gagné. Tant pis. Sans trop se mouiller, on suppose que l'on arrivera quand-même à bon port si l'on se jette à l'eau. Car? nage à la brasse ou en crawl, nous voilà !
À deux doigts du carnage !
En moins de temps qu'il n'en faut pour dire « Raymond Devos », nous arrivons à destination : l'Arena di Campo San Polo. Malgré son nom de stade de foot transalpin, ce n'est finalement qu'une petite place. Mais ce soir, ce n'est pas n'importe laquelle : sous nos yeux affolés, un bon millier de supporters polanskiens déchainés, arrivés avec près de deux heures d'avance, sont agglutinés en file indienne. L'attente est déprimante, du genre à décourager les cinéphiles les plus téméraires, du genre à rebuter des fans de Star Wars à un director's cut de L'Empire contre-attaque.
Une heure et demie s'écoule, et les quidams les plus excentriques défilent devant nous : des négociateurs prêts à tour pour décrocher un ticket, des coupes-file professionnels (« On se connait non ? ») et même des mamies à tête chercheuse (une espèce à découvrir : une femme s'arme de sa grand-mère comme bouclier pour avancer dans la foule). Soudainement, à une demi-heure du début de Carnage, le compteur des places disponibles se met à défiler n'importe comment. Le compte-à-rebours s'affole alors que la file est à l'arrêt : plus que 428 places, 388, 231, 160, 37? Puis on avance de nouveau jusqu'à ce que, bien évidemment, la caissière arrête la vente juste devant nous. JUSTE DEVANT NOUS ! L'idée d'un braquage hystérique façon Honey Bunny & Pumpkin dans Pulp Fiction nous traverse l'esprit. Au terme d'une interminable minute de suspense, quelques billets sont remis en vente. Enfin, nous recevons les précieux sésames (ou plutôt "achetons" les précieux sésames, nos badges presse étant superflus ce soir).
Faites des enfants qu'ils disaient...
Ca y est, nous assistons à notre première projection de la 68ème Mostra. Début du Carnage. Pour tempérer notre enthousiasme, il en faudrait plus que des dialogues à deux cents kilomètres à l'heure en V.O sans sous-titres. Il en faudrait même plus que cette spectatrice complètement siphonnée qui berce son bébé hurleur dans un landau juste à côté de nous.
La lutte désespérée de cette femme pour calmer son enfant trouvant alors un étrange écho à l'écran. Avec Carnage, Roman Polanski a mis en images une redoutable campagne publicitaire de 90 minutes pour la contraception. Un bon nombre de répliques assénées par les personnages de John C. Reilly et Christoph Waltz pourraient presque convaincre Brangelina de renvoyer leurs six gamins au service-après-vente.
Quelques heures plus tard, le visionnage d'une adaptation (réussie) du Petit Poucet par Marina De Van confirmera notre sentiment : les sélectionneurs de la Mostra n'ont pas très envie que l'on se reproduise. En ce qui nous concerne, c'est tant mieux : ce n'était pas au programme !
Pour suivre toute la Mostra de Venise 2011
Chris & Hendy, nos envoyés spéciaux à Venise 2011
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IMtheRookie5 septembre 2011 Voir la discussion...
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Sushi_Overdose5 septembre 2011 Voir la discussion...