Un film original peut-il avoir du succès ?
Un coup d'oeil au box office, et la constatation est là. Prequels, suites, remakes, adaptations et autres reboots trustent le haut du classement... Les films à succès ont presque tous en commun de briller par leur absence de singularité. D'où cette question volontairement provocatrice : un film original peut-il être avoir du succès ?
Michel Hazanavicius recevant un Oscar
Avatar, Titanic, Avengers, Harry Potter, Transformers 3. Les records du box-office mondial appartiennent à des suites, des adaptations littéraires ou d'histoires vraies... Seul Avatar sort du lot pour son scénario un tant soit peu « original ». Parce qu'il faut bien l'avouer, l'histoire d'Avatar est vieille comme le monde. Alors qu'ont-ils d'autres en commun ? Manquer d'originalité ? Avec un budget colossal et une promo en béton, ces films ne sont pas faits pour être des échecs. Faut-il pour autant en venir à la conclusion qu'aujourd'hui, un film vraiment original n'a aucune chance d'être un succès ? Cette semaine, on peut d'ores et déjà affirmer qu'Holy Motors de Leos Carax, ne fera pas le poids face au nouveau Spider-Man et passera vite à la trappe pour les non-cinéphiles. Et pourtant, quel dommage ! Alors bien sûr, parfois, seulement parfois, il y a des exceptions. Comme par exemple Ted, le premier film de Seth MacFarlane, qui caracolait en tête du box office américain la semaine dernière en réussissant même à détrôner Rebelle, le dernier film d'animation signé Pixar. Cependant, il faut bien l'avouer car le constat est là : les Majors ne laissent plus leur chance aux films originaux. Hollywood a perdu son goût du risque. Hors de question en cette période de crise de faire dans le hasardeux ; il faut miser sur des films sûrs, des films dont on est certain qu'ils marcheront, même s'ils coûtent plus chers. Sequels, prequels, remakes, adaptations. Et parfois même prequel de remake. De quoi faire perdre la tête, et tout cela au détriment de la créativité artistique. A croire que les films originaux n'ont aucune chance de marcher.
La fin des films originaux ?
Alors, les films originaux n'attirent-ils plus personne ? Heureusement, non. La baisse de la fréquentation des salles aux États-Unis s'aggrave de jour en jour, conséquence d'un marché en crise. Le piratage de films sur internet, bête noire des producteurs, est loin d'être la principale raison de cette baisse de fréquentation. Des prix exorbitants et en hausse, une standardisation tant esthétique que narrative, voilà ce qui tue à petit feu le cinéma aujourd'hui. Pour preuve, le marché du film français, qui lui, se porte bien. Certes, il a connu mieux, mais il a aussi connu pire. Aux États-Unis, le taux de fréquentation n'a jamais été aussi bas depuis 1995, et il continue à baisser mois après mois. En France, ce taux a augmenté ; +5% par rapport à l'année dernière selon le CNC. Le marché français est en forme. Les succès relatifs d'Intouchables, The Artist, Polisse ou bien encore La guerre est déclarée le démontrent. Certes « l'histoire vraie » rôde, mais ces films sont bien différents les uns des autres. Des films qui marchent donc, mais peut-être un peu trop. Une partie de la presse s'est alors retournée contre ce succès. Contrairement à Hollywood, si un film se porte bien sur le marché français, il devient de suite suspect. Paradoxe étonnant de notre côté de l'Atlantique, à croire qu'un film original n'aurait pas le droit de bien marcher. Mais ne glissons pas dans cette pensée élitiste et réductive du cinéma français et américain, à la Godard, qui clame haut et fort qu'Hollywood a de l'argent, mais pas d'idées.
Originalité et valeur artistique
Il faut ainsi rendre justice au cinéma hollywoodien. D'abord la notion d'originalité ne peut se fonder uniquement sur la source d'inspiration du film. Bon nombre de drame familiaux français « originaux » forment finalement un genre répétitif et sans surprises. L'originalité et la nouveauté sont des concepts bien relatifs comme le prouve The Artist qui a fait figure de brillant OVNI en 2011 mais qui aurait été beaucoup plus commun dans les années 30. Un tel film aurait-il connu le même succès s'il était sorti à une autre époque ? Rien n'est moins sûr. Un film original doit donc apporter quelque chose de nouveau aux spectateurs, quelque chose qu'ils n'ont pas (ou plus) l'habitude de voir au cinéma. Or rompre avec les habitudes des spectateurs peut également sembler périlleux. Comme des enfants qui ne se lassent jamais de revoir toujours le même film le spectateur est-il condamné à être éternellement biberonné à la même soupe ? Le pire étant que si quelques cinéastes frondeurs finissent par parvenir à démontrer que l'originalité peut payer... on se mette à les copier !
Image © Academy Awards
L'intérêt de cette article, du moins comme je l'ai pensé, c'est de se demander pourquoi les producteurs aujourd'hui ne laissent plus leur chance aux films originaux. Le box office le montre ; on n'a le droit qu'à des adaptations, des remakes, ou des suites. Quand un réalisateur veut faire un film un tant soit peu original, on ne le laisse pas faire aussi facilement, et on le met sur d'autres projets avant pour faire ses preuves. Faire un film original, d'accord. A condition de prouver que l'on peut rapporter gros avant. Cela ne veut en aucun cas dire que les films que produisent les Majors sont mauvais. J'ai personnellement adoré Avatar (et ne parlons même pas de mon amour inconditionnel pour Inception et Christopher Nolan) ; même si je souligne le manque d'originalité de son scénario dans cet article, l'univers du film est loin d'être banal. L'originalité d'un film ne repose pas que sur son scénario ; pour Avatar, cela repose sur la nouveauté qu'apporte la technique utilisée. Comme je l'ai dit dans l'article : " Un film original doit donc apporter quelque chose de nouveau aux spectateurs, quelque chose qu'ils n'ont pas (ou plus) l'habitude de voir au cinéma ".
Par contre, je ne pense pas que l'on puisse dire que le cinéma est un plagiat continu ; le mot est trop fort et inadéquat. Le cinéma est un art composite, qui s'inspire des autres arts qui l'ont précédé, comme la littérature, la peinture, la musique, etc... Il s'inspire, et l'adapte. Il ne plagie pas.
Je pense malheureusement que l'élitisme à la Godard est bel et bien présent ; cinéma américain vs cinéma français. Comme vous le dites, Hollywood a réalisé de très bons films, et de très grands chef d'oeuvres. Il y a une volonté un peu nombriliste à voir croire que nous, français et inventeurs du cinéma, nous réalisons des films 'meilleurs' et nous avons des idées.
Ensuite, un film original est forcément un film bon ; parce qu'il se démarque, qu'il apporte quelque chose de nouveau. Après, qu'on aime ou pas, c'est une question de goût, et non pas une question d'originalité.
Heureusement, il y a toujours des films intéressants qui sortent, mais de moins en moins (j'ai failli pleurer quand j'ai vu qu'Holy Motors ne passait pas à Chalon), en 2010 et 2011, j'allais au cinéma plus souvent que cette année qui est un maigre festin (à part Moonrise Kingdom, je n'ai pas vu de chef-d'oeuvre).
Aussi, je critiquerais le fait que les gens font marcher Hollywood et ses remakes ridicules (10 ans après l'original pour cetains, vous savez de quoi je parle) Je n'ai rien contre les suites, c'est normal, mais les reboot, remakes ont tendance à me sortir de mes gonds, de toute façon je suis sur que Batman sera rebootè, sachant aque la trilogie Nolan s'achève, mais rien, rien n'est plus scandaleux que l'èviction foireuse de Sam Raimi, surtout qu'on a vu le résultat.
J'ajouterai qu'il y a le même problème pour la musique. Les grandes maisons de disques et distributeurs [Universal (EMI), Sony, ...] pensent avant tout à faire leur chiffre d'affaire et détruisent toute idée d'expérimentation/innovation musicale.
La musique qui se vend le mieux - comme le cinéma - est la moins originale. C'est triste à dire. Mais le problème provient-il du public? Le public est-il dans un mode de consommation où la notion d'"art" n'a plus sa place que pour quelques passionnés? J'ai encore un peu d'espoir en ce que l'on nomme "le grand public", j'aime à penser que la faute revient plutôt aux grand distributeurs qui s’assoient confortablement sur leurs succès assurés et financent les campagnes de publicités. Je suis d'ailleurs assez choqué de voir toute la pub que peut avoir un Harry Potter, Transformers ou - actuellement - The Dark Knight Rises, alors que c'est précisément des films qui n'ont pas besoin de publicité...
Bref, triste époque. On a encore heureusement quelques festivals (Sundance, Cannes, etc.) qui permettent de mettre un peu en lumière des films originaux. Quant aux oscars, c'est devenu une farce, tout comme les grammy awards pour la musique (et ne parlons pas des MTV awards....)...
Bon bref, je me suis emporté =)