J'ai vu L’Odyssée de Pi en immersion... dans une barque
Pour célébrer comme il se doit la sortie de l'étourdissant Odyssée de Pi, la Fox a eu (il faut le reconnaître) une idée de génie. L'opération qui avait déjà été mise en place il y a quelques temps pour une projection de Titanic reposait sur un principe simple : nous mettre dans les mêmes conditions que le personnage principal. Le film d'Ang Lee a ainsi été projeté en avant-première dans une piscine parisienne. Exit sièges moelleux et pop-corn, les spectateurs ont visionné le film à la rustre... dans une barque, comme le héros. Comment qu'on dit ? Ah oui, tous dans le même bateau !
Tel un Bilbo des temps modernes (les pieds poilus en moins), me voilà embarqué dans un voyage inattendu. La mission qui m'a été confiée requiert une sacrée dose de courage : ce soir, je suis Pi Patel et je vais voguer sur la mer déchainée de la piscine Pailleron.
Première épreuve : la longue file d'attente et le froid polaire. Je serre les dents et me réchauffe avec ce mur de lumière rose qui filtre à travers les vitres de l'entrée de la bâtisse, délicate promesse d'un instant figé dans le temps. Car c'est bien cela : le pas de porte franchi, on oublie toute notion de réalité pour laisser son imaginaire vagabonder. D'une cascade de fleur de lotus se déversant des escaliers, mon regard papillonne des plantes exotiques aux étoffes étincelantes des saris portés par les hôtesses d'accueil. La splendide bande originale du film s'échappant des haut-parleurs parachève l'immersion. Difficile de ne pas succomber au charme...
Namasté !
Je progresse vers l'intérieur du complexe sportif sur un tapis rouge (eh oh, c'est une avant-première quand même) pour découvrir l'architecture remarquable des lieux. La trentaine de barques blanches apportée pour l'occasion flottent déjà à la surface de l'eau, d'une étrange couleur bleu turquoise. Autour du bassin, trois étages de cabines et balustrades sont baignés par des projecteurs pourpres. Avec son immense verrière, l'ensemble rappelle la structure d'un paquebot, inspiration évidente du maître d'oeuvre Lucien Pollet. Pour l'anecdote, l'architecte a aussi (et surtout) construit la piscine Molitor, complexe nautique typique du style art déco, aujourd'hui détruite, et qui donne son nom au héros du film d'Ang Lee. On comprend mieux le choix du lieu de la projection !
Direction les vestiaires à l'étage donc, pour se défaire de ses affaires et récupérer l'accessoire in-dis-pen-sable pour l'événement : le gilet de sauvetage orange fluo. Puisque je n'ai pas pris mon maillot en cas d'éventuel naufrage, je l'enfile par les épaules et me voilà fin prêt. La Fox a même pensé à tout en offrant aux spectateurs un sac de toile « kit de survie » contenant... un plaid bleu nuit estampillé d'une fleur de lotus. Pas sûr que ça me soit utile face à un tigre du Bengale de 200 kilos, hein.
Kit de survivor
Après une petite pause PiPi (pardon...) non négociable car plus de 120 minutes de film sans possibilité de sortie, l'heure n'est plus à la rigolade : l'embarquement approche. Les passagers du soir se hissent tant bien que mal dans les canots, et moi j'ai les images du Titanic qui défilent devant mes yeux ; je prie pour ne pas avoir à subir le même triste sort. Voyez-vous, grimper dans les barques est un exercice exigeant, mélange d'acrobatie, d'équilibre et de « MAIS ARRETEZ DE FAIRE BOUGER LE BATEAU, BORDEL ». Le confort n'est pas franchement optimal, le séant juché sur un morceau de bois et un piteux cousin, mais c'est aussi tout l'intérêt de l'expérience.
20h40, les lumières s'éteignent, la toile géante ressemble à un iceberg menaçant. Le bercement de nos canots à la dérive (mais attachés en ligne par des cordes) apporte un certain réconfort. Le mal de dos et la buée sur les lunettes un peu moins, mais une fois le générique d'ouverture à l'écran, plus rien au monde n'existe à part la féérique odyssée. Celle de Pi, et la mienne. Quand la tempête gronde et dévaste le cargo du héros et de sa famille, mon canot s'entrechoque contre celui du voisin. Frissons garantis. Grace à la 3D (probablement la plus saisissante depuis Avatar), l'identification est immédiate. Je traverse le Pacifique, subis la colère de l'océan, affronte la faim (je n'ai rien avaler), la pluie (de l'eau au fond de ma barque) et Richard Parker, mon compagnon de voyage tout en poils et griffes. Parfois j'ai froid, parfois je me sens seul, comme Pi, parfois je regarde le ciel et voit se refléter des millions d'étoiles, comme les éclats verts des issues de secours.
La fin de l'épopée est un retour sur terre sec et brutal. Mon esprit n'est plus là, loin, embrumé par la féérie visuelle et le tourbillon émotionnel que je viens de traverser. La salle entière met quelques dizaines de secondes avant d'offrir des applaudissements abasourdis. Sans jamais rien brusquer, Ang Lee pousse une réflexion sur l'essence du cinéma. Et moi, après cette expérience sensorielle inédite, je fais le choix de croire en sa magie.
-
viadd7 décembre 2012 Voir la discussion...
-
Michel_XL9 décembre 2012 Voir la discussion...
-
foogy9 décembre 2012 Voir la discussion...
-
IMtheRookie9 décembre 2012 Voir la discussion...
-
Nykmeroren9 décembre 2012 Voir la discussion...
-
IMtheRookie10 décembre 2012 Voir la discussion...
-
ProfilSupprime20 décembre 2012 Voir la discussion...