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Street Dance 2 : Le film de danse est-il un genre dépassé ?

Dossier | Par Brice Lahaye | Le 14 mai 2012 à 18h10
Tags : danse, hip-hop

Les films de danse urbaine sont devenus monnaie courante depuis quelques années. Street Dance 2, sorti en salle mercredi dernier, en est le parfait exemple. Un plaisir jouissif, technique et purement esthétique. Mais le genre s'épuise bien vite et la surprise n'est plus vraiment au rendez-vous. Difficile en effet de se renouveler après tous ces films réalisés en si peu de temps. Et si le genre était simplement déjà dépassé ?

Avec de sérieux concurrents à l'affiche en ce moment (notamment Avengers et Dark Shadows), la sortie de Street Dance 2 dans les salles mercredi dernier sera probablement passée inaperçue. Un plus petit film dont la promotion n'est pas la même mais qui dégage surtout une grande impression de déjà vu. Certains penseront déjà l'avoir dans leur filmothèque, d'autres imaginent que cette suite est probablement moins bonne (déjà que le premier n'était pas top), et les derniers trouvent sûrement honteuse l'idée d'aller voir un film de danse sur grand écran. Rien qui ne laisse présager donc que ce film reste très longtemps à l'affiche. La faute peut-être aussi au genre qui peine à se renouveler et semble même déjà un peu dépassé.

Marqueurs de courants musicaux

Bien qu'il soit de plus en plus présent en salle ces dernières années, le film de danse n'est pas un genre nouveau et a su marquer plusieurs générations. Le disco, symbole des années 70, était porté à l'écran avec des films aujourd'hui devenus incontournables. La Fièvre du samedi soir (1977) en est le plus célèbre exemple. Le début des années 80, moins marqué par un genre de danse précis, laissait de la place à de nouveaux courants musicaux. Certains d'entre eux se voyaient propulsés sur grand écran et devenir l'objet de films cultes. La danse de salon était notamment représentée dans des scènes de danse de chachacha et de mambo endiablées dans le fameux Dirty Dancing (1987).


Oh lover boy, extrait de Dirty Dancing

La country, arrivant directement du sud-est des États-Unis, était elle aussi mise à l'honneur en 1983 dans le désormais célèbre Footloose. Si pendant les années 90 nous avons vu émerger un renouveau de la musique rock avec le grunge, et une démocratisation grandissante de la techno, il semblait difficile de leur consacrer des films musicaux et surtout des parties dansées. Il aura fallu attendre une nouvelle tendance musicale, finalement arrivée au début des années 2000, pour voir déferler une vague de nouveaux longs métrages consacrés, pour la grande majorité, à la danse de rue (le street style, ça fait plus classe !). Le hip-hop et ses différents courants sont une aubaine pour quiconque voudrait se lancer dans la réalisation d'un film du genre en ce moment. Les nouvelles franchises, avec entre autres Sexy Dance ou Honey, pullulent sur nos écrans ces dernières années.

Des films qui se démodent vite ?

Mais si ces derniers films restent encore d'actualité, les précédents, qui on su transcender une génération, ne sont-ils pas devenus complètement hasbeen ? Oui, plus qu'un autre genre, le film de danse est le marqueur de son époque et c'est en cela qu'il devient très rapidement un objet dépassé, sans grande surprise et aux effets démodés. Réadapter un succès des années '80 en 2010 n'était donc probablement pas une bonne idée. Le remake de Footloose, sorti dans les salles en décembre dernier, est un exemple de ce qui ne peut plus fonctionner aujourd'hui. Craig Brewer, qui semble avoir compris que le public du genre était particulièrement jeune, a tout de même décidé de coller à la tendance actuelle. Le résultat est une suite complètement ringarde auquel le réalisateur a ajouté une pincée de hip-hop. La scène un peu rock de la version originale laisse donc place au RnB et l'acteur ne sait vraisemblablement pas s'il doit danser la country, se mettre au break-dance ou se lancer dans une folle tecktonik (oui, Kenny Wormald aime beaucoup balancer ses bras dans tous les sens). Je vous laisse imaginer la scène !

Ne pas avoir l'air dépassé dès sa sortie signifierait donc qu'il faille actuellement réaliser un film sur le hip-hop. Mais d'autres films ont su trouver leur public, en ne surfant justement pas sur un genre précis à un moment donné, mais sur des mouvances musicales plus larges, ou des types de danse moins représentés à l'écran. C'est le cas du film de Win Wenders, Pina, hommage à la célèbre chorégraphe allemande Pina Bausch, figure de la danse contemporaine décédée en 2009. Le film, à mille lieux de ce qu'on voit actuellement dans le genre, a tout de même pu trouver son public, plus large, ou du moins différent de celui qui peut se passionner pour Street Dance et cie. Retenons donc que l'idée de développer un film sur une danse à la mode n'est pas toujours une bonne idée. A moins qu'un courageux réalisateur ne veuille tenter la réalisation d'un long-métrage suivant quelques jeunes danseurs de tecktonik ? Il pourrait alors faire appel à Kenny Wormald.

Retour en force grâce à la 3D

Le film de danse des années 2000 devrait donc en toute logique finir par lasser lui aussi le public. D'ici quelques années il s'en souviendra avec tendresse et s'en moquera peut-être gentiment. Néanmoins, si ce genre plus qu'un autre peut réussir à dépasser ce phénomène, c'est peut-être aussi parce qu'il est arrivé au bon moment : celui de l'émergence de nouvelles technologies numériques. Le film de danse trouvera peut-être son salut dans l'utilisation de la 3D. C'est ce que les derniers exemples en date laissent en tout cas penser. La profondeur de champ que permet le film nous propulse directement dans l'écran, avec la nette impression de participer à l'action. Les scènes de battle, avec les spectateurs encerclant les danseurs, sont à ce titre les plus réussies. On croirait presque faire partie du dispositif filmique. Une astuce que les réalisateurs ont bien compris. Même si nous ne nous intéressons que très peu au scénario du film, Sexy Dance 3 (le plus recommandable d'entre tous) réussit pourtant à proposer une intrigue qui tient la route et des scènes de danse vraiment abouties. En plus de jouer sur la profondeur pour les scènes de groupe, le réalisateur Jon Chu parvient également à faire entrer le danseur (ou plutôt ses membres) dans la salle. L'utilisation de la 3D se justifie alors totalement.


Robotnik, extrait de Sexy Dance 3D

Finalement, le film de danse réussira peut-être à se renouveler mais difficilement à s'inscrire dans le patrimoine cinématographique. A moins que la solution ne soit, comme on l'a vu pour Pina, de s'intéresser aux danses qui ne se démoderont jamais. Le film Black Swan de Darren Aronofsky, et sa vision de la danse classique, est peut-être l'exemple à suivre. Plus qu'un film de danse, nous assistons à un ballet exprimant tout le drame d'un personnage meurtri, terriblement angoissé, pour qui la danse est un exutoire, une obligation, quelque chose de vital. Plus que de simples mouvements en somme.

Si les jeunes cinéastes réussissent alors à allier une écriture de qualité aux nouveaux outils techniques qui s'offrent à eux, on peut espérer que les films de danse ne pourront alors qu'aller en s'améliorant.

Images : © Metropolitan FilmExport, © Paramount Pictures

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