Votre Top cinéma 2017
Le 31 décembre dernier à minuit, pendant que vous échangiez des bises avec tonton Léon, nous prenions en photo votre top annuel, histoire d’en garder un cliché fidèle. Car avant d’entamer l’an de grâce 2018 qui s’annonce haut en couleurs, il est temps de débriefer et revenir sur une année de cinéma placée sous le sceau de la lucidité, à bien des égards. Il faut peut-être en chercher la cause dans le passé : si 2016 était l’occasion de panser les plaies de la funeste année précédente, criblée par les attentats, 2017 aura sans doute été le temps du deuil consenti et de la résilience.
Back to the future
Rappelez-vous : avec Jodorowsky’s Dune, le documentaire de Franck Pavitc, vous placiez tout en haut de votre panthéon 2016 une chimère, un projet suffisamment fou pour qu’il ne voit jamais le jour, autorisant tous les fantasmes de gloire. Un rêve commode en somme, celui d’imaginer un avenir autrement radieux, mais aussi une des vertus du cinéma : chercher un peu de réconfort dans l’imaginaire. Et que dire du reste du top 5 ? Quatre films d’animation. C’était beaucoup, et éloquent : des contes initiatiques suffisamment intrépides pour oublier (Kubo et l’armure magique, Tout en haut du monde) à la politique assez amicale et optimiste pour espérer (Zootopie, Ma vie de courgette).
Vous repoussiez alors un peu plus loin les autres films, disons peut-être plus sensibles, sans les cacher pour autant, mais sans leur offrir non plus le bonheur de réveiller les blessures. Ainsi de grands films tels que Julieta de Pedro Almodóvar, Elle de Paul Verhoeven, Aquarius de Kleber Mendonça Filho ou même Les Huit salopards de Quentin Tarantino, réalisateur pourtant extrêmement populaire dans la communauté, suivaient un peu en retrait, presque honteux de leur éclat.
Le Miroir
En 2017, vous vous êtes un peu repris en main. Le temps a fait son œuvre, alors vous avez consenti à regarder les choses en face. Certes, c’est bien un dessin animé qui trône dans votre top 42, mais pas n’importe lequel : Coco, un voyage au pays des morts, aussi bariolé que macabre. On avait l’habitude avec Pixar, sauf qu’aujourd’hui il ne s’agit plus de faire le deuil de son enfance ou du passé, mais bien d’êtres en chair et surtout en os. Pour autant, c’est quand même de deuil qu’il est question, autrement dit de confrontation et d’acceptation.
Regarder les choses en face, le réel au moins, consiste sans doute aussi à classer trois documentaires aux premières places plutôt que 4 dessins-animés. Le plus plébiscité d’entre eux, I Am Not Your Negro de Raoul Peck, revient sur les luttes afro-américaines en dressant le portrait de James Baldwin, fil rouge du récit et lien entre les différents leaders noirs de l’époque, tous implacablement assassinés. Depardon prend la suite avec 12 Jours, observation tour-à-tour clinique et amusée de l’institution psychiatrique à l’épreuve de la justice. Dès qu’on peut en rire, on est rattrapé par l’atroce ou l’émotion, comme si la lumière crue du réel tanguait sur l’être à nu. Carré 35 d’Eric Caravaca ferme le bal en s’attaquant aussi à des cadavres, de ceux qu’on planque dans le placard : l’histoire d’une petite fille morte et enterrée si jeune qu’on en avait caché l’existence à son frère, qui lui, a voulu la faire remonter à la surface, celle des non-dits.
Enfin, hors documentaire, mais toujours aussi implacable, le très beau Faute d’amour de Zviaguintiev termine ce top 5 sans plus de concession, en portant un regard assez noir sur la Russie et plus généralement sur un monde en proie à l'autisme technologique. Plus loin, dans le top 15, ça n’est guère plus gai avec par exemple le chef-d’œuvre de l’année, Billy Lynn, film de dieux, de morts-vivants et de fantômes, La La Land et sa bien triste histoire d’amour musicale, le très délétère polar Que Dios Nos Perdone ou encore Get out et son exploration du racisme mi-comique, mi-cauchemardesque. Même Logan, seul film de superhéros à figurer dans le top, transfigure le genre en film (très) noir, d’une violence mate et brute, déchaînée. Pour finir, Nothingwood, documentaire hilarant de Sonia Kronlund sur le cinéma Z afghan, n’oublie pas de nous rappeler qu’il est tourné sur des charniers.
Alors, cette année 2017, une année triste ? Certainement pas : une année perçante oui, mais une année du renouveau et de la reconstruction. Pour s'en convaincre, reste à nous dire quels films vous attendez avec le plus de ferveur, en commentaires ci-dessous. Et pour garder une image précise de l'année écoulée, voici les tops 5 conjoints des vodkastos et de la rédaction de Télérama (liste complète en lien ici) :
Top 5 Vodkaster
Top 5 Télérama
Reste à vous souhaiter une très belle année de cinéma, sur Télérama-Vodkaster
De mon côté, j'aurais volontiers mis Billy Lynn à la place...