time after time

Le voyage dans le temps au cinéma, des années 60 à nos jours

Dossier | Par romain lamy | Le 16 novembre 2012 à 18h39

Qu'elle soit magique, absurde, extraterrestre, métaphorique ou s'approchant d'une forme scientifiquement rationnelle, la machine à voyager dans le temps est un personnage récurrent du cinéma. Elle est étroitement liée aux problématiques esthétiques, industrielles et scientifiques des époques durant lesquelles elle est imaginée. Véritable exercice de style pour les cinéastes (et les décorateurs), elle incarne un voyage dans le temps qui n'est pas forcément celui que l'on croit...

Pour faire écho à la sortie récente de Looper, nous avons réalisé une infographie (dont vous pouvez voir un extrait ci-dessus) rassemblant 15 manières de voyager dans le temps au cinéma depuis 1960. Il s'agit pour l'essentiel de machines plus ou moins encombrantes, à l'exception du cas de Looper. Nous avons en effet considéré que le résultat du voyage était visuellement plus marquant que la machine en elle-même qui apparait à peine dans le film.

La machine de Looper

Le voyage dans le temps fait partie des fantasmes absolus de l'humanité. Le cinéma en a fait son marronnier, avec plus de soixante-dix films sur le sujet. Réglé comme une horloge, le cinéma continue chaque année à imaginer des machines, toutes plus folles les unes que les autres.

Les années 60 : les fondamentaux

L'emblématique ancêtre de toutes les machines à voyager dans le temps est née dans une chambre d'hôpital de l'Angleterre victorienne en 1895, sous la plume de H-G Wells. Le roman ne sera adapté au cinéma qu'en 1960 dans un film au titre éponyme : La machine à explorer le temps. Simple d'utilisation (un levier et une sorte de parasol qui tourne derrière le pilote), ultra-décorée, cette première machine ressemble plus à un chariot de vendeur de glace qu'à l'idée que l'on se fait du fleuron de la science moderne...


Accélération du temps, extrait de La Machine à explorer le temps

Il faut dire que l'action se déroule au début du siècle, en pleine révolution industrielle et la machine se devait d'incarner le XIXe. L'enjeu du film étant de jouer sur les contrastes entre la machine et les époques qu'elles visitent. Aujourd'hui devenu culte, un remake du film de George Pal a vu le jour en 2002. La machine se retrouve un peu modernisée, des panneaux en aluminium remplace le parasol arts déco. Malheureusement, le film n'est pas à la hauteur des attentes, malgré le fait qu'il ait été réalisé par Simon Wells, l'arrière petit-fils de l'illustre écrivain. Une scène à sauver toutefois, le démarrage de la machine, toujours aussi fascinant ...


Evolution du temps, extrait de La Machine à explorer le temps - Time machine

C'est en 1968 avec La planète des singes que le cinéma évoque pour la première fois un voyage dans le temps plus ou moins scientifiquement envisageable par l'homme. Icare : le vaisseau qui va plus vite que la lumière. Un nom emprunté au mythe du demi-dieu Icare qui n'a rien hasardeux. Celui-ci meurt après avoir volé trop près du soleil. Le mythe évoque le désir de l'homme d'aller toujours plus loin, au risque de « se brûler les ailes », devant faire face à sa condition de simple être humain. En effet, le vaisseau emmène ses astronautes dans le futur, en 3978 sur une mystérieuse planète qui ressemble étrangement à la terre, peuplée par des singes qui dominent les hommes... Réalisé six ans après la crise de Cuba et en pleine compétition spatiale entre les États-Unis et l'URSS, le choix du nom du vaisseau (absent du roman éponyme de Pierre Boulle) sonne comme une prémonition moraliste, jouant sur les angoisses d'un contexte politique particulièrement tendu...


(Spoiler) Scène Finale, extrait de La Planète des singes

Heureusement, les années 60 ne sont pas que guerre froide et crise géopolitique mondiale. C'est aussi les années Pop. Et quelle meilleure exemple pour incarner cette exubérance créative que la machine à remonter le temps du film d'Alain Resnais : Je t'aime, Je t'aime. D'extérieur, on dirait un gros chou-fleur psychédélique. A l'intérieur, de la moquette marron de partout, et un décor digne de l'architecte Verner Panton : des formes futuristes et généreuses avec des pouffes cylindriques en peaux de bêtes...

Dehors.

Dedans.

Les années 80 : la DeLorean DMC-12

Il faudra attendre les années 80 pour retrouver une machine à remonter le temps digne de ce nom : la Delorean DMC-12, et son convecteur temporel. Porte papillon, carrosserie en acier inoxydable, le futurisme 80's dans toute sa splendeur : fleuron technologique pour Doc et ringarde à mort pour Marty, les deux protagonistes de la saga Retour vers le futur.


Back to the future, extrait de Retour vers le futur

On pourrait accuser les producteurs de Retour vers le futur d'avoir détourné le film en une vilaine pub pour une voiture, tant la marque est omniprésente dans la trilogie. Sauf que lorsque le film de Robert Zemeckis est sorti en 1985, la Delorean n'était déjà plus vendue. Unique modèle vendue par l'entreprise créée en 1981, celle-ci a fait faillite deux ans plus tard. Parallèlement à cela, le propriétaire de la marque J. Z Delorean est inculpé pour trafic de drogue.

De l'autre côté de l'océan pacifique, la même année que Retour vers le futur, une étrange machine voit également le jour, celle du film parodique 5 secondes avant l'Extase du Japonais Taimu Abanchûru, sorti en 1985.

Le fonctionnement est simple : le voyage s'opère ... grâce aux orgasmes. L'énergie qu'ils dégagent est si puissante qu'elle permet à l'héroïne du film Etsuko de voyager dans le futur, en 2010. Fallait y penser...

Les années 90 : c'est dans les vieux pots...

Avec Timecop une dizaine d'années plus tard, le dispositif de la machine sera le même que dans Retour vers le futur : une voiture de course lancée à fond la caisse et qui traverse une porte spatio-temporelle générée par la vitesse. Seule petite originalité pour cette nouvelle machine : un rail. Pas de quoi sauter au plafond... Ce qui est par contre amusant, c'est que la machine disparaît une fois qu'elle traverse la porte spatio-temporelle, sans pour autant réapparaître dans le passé : ses passagers étant éjectés dans la nature. La faute de la scripte? Une petite incohérence en tout cas, difficilement acceptable...


Timecop, voyage dans le temps, extrait de Timecop

Reprenant a son compte La jetée du réalisateur Chris Marker (Le fond de l'air est rouge), Terry Gilliam reste lui aussi dans les clous : Dans l'armée des 12 singes, même architecture que Timecop, Bruce Willis traverse le temps dans un sas en plastique qui disparaît également dans une porte temporelle.


Boyaux, extrait de L'Armée des 12 singes

Les aventures de Bill et Ted sorti en 1991 utilise sans vergogne une cabine téléphonique pour voyager dans le temps. Un concept qui rappelle franchement le célèbre Tardis, la machine du Dr Who. A quelques détails près, le Tardis n'est pas vraiment une cabine téléphonique mais une cabine de police londonienne.

Bref, il faudra encore attendre quelques années pour que les machines à remonter le temps vivent leur petite révolution esthétique au cinéma.

Les années 2000 : a kind of magic

Babiole poudlarienne dans Harry Potter, télécommande universelle dans Click, dague remplie du sable des dieux dans Prince of Persia, carnets intimes interactifs pour l'Effet Papillon, jacuzzi qui se transforme en geyser dans La machine à démonter le temps ou encore une camisole de force (!) dans The Jacket, les années 2000 sont définitivement celles de la créativité, de nombreuses machines voient le jour sous des formes exubérantes. L'heure est à la magie et au fantastique. Peu à peu les machines quittent le champ de la science-fiction, se faisant une place dans les comédies familiales. A remarquer également, les nouvelles machines à explorer le temps s'alignent sur les progrès de la technologie de l'époque, elles deviennent un objet de taille modeste qui peuvent tenir dans une poche... A nos risques et périls...


Michael frappe son boss., extrait de Click : Télécommandez votre vie

Les années 2010 : vintage

Midnight in Paris et Lopper remettent au goût du jour la machine dans ses formes originelles. Basique pour Lopper : une cavité aux formes rondes, avec des tuyaux et des câbles. Une voiture de marque mythique (la peugeot Type184 Landaulet) pour le film de Woody Allen.


La DeLorean DMC-12 de Woody Allen, extrait de Minuit à Paris

Réduite à d'anecdotiques et discrètes apparitions, les machines à évoluer dans le temps ne sont toutefois plus ce qu'elles étaient, l'exercice de style se trouvant cantonné au second degré ou quelque peu ringardisé...

Comme si de nos jours, la balle serait moins du côté de l'imagination et nettement plus du côté de la science...

[VISUEL] Evolution du voyage dans le temps au cinéma
Une liste de films avec voyages dans le temps ou paradoxes temporels

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1 commentaire
  • Wed
    commentaire modéré Joli travail! Le schéma est chouette et l'article intéressant.
    17 novembre 2012 Voir la discussion...
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