Pirates des Caraïbes 4, les blockbusters à l'abordage de la Sélection
Le festival de Cannes vient d'ouvrir ses portes sur une sélection officielle plus qu'alléchante. Les quelques projections de ces derniers jours ont fait se déplacer les foules et frémir les méninges des critiques.
Pourtant, si les enjeux des 20 oeuvres de la sélection en compétition s'avèrent simples à esquisser en toute logique (avoir un prix pardi), la participation des films estampillés hors-compétition, aussi attrayants soient-ils, reste nimbée de mystère. Cette année, c'est au tour des pirates de hisser la grand-voile et le pavillon à la palme dorée.
Bien entendu, le prestige de Cannes occulte profondément ses manoeuvres de marchand de tapis rouge sous lequel se cache un matelas de billets verts. Le mercantilisme se reflète-t-il dans ces choix déroutants de films hors-compétition ? Une occasion pour nous de déflorer l'aspect économique du Festival de Cannes. Money money money...
Paillettes et flouze sur tapis rouge
Les 20 petits chanceux du cinéma mondial sélectionnés pour la compétition sont communément encensés pour leurs esthétiques particulières et leur originalité. A Cannes, on cherche à mettre en exergue le renouveau, l'audace, ce qui, en tout état de cause, n'inonde pas les salles obscures aujourd'hui. Même s'il n'est pas en compétition (imaginez que cela arrive?), face à Sleeping Beauty, We Need to talk about Kevin, Habemus Papam, Melancholia et les autres, le quatrième volet de la franchise Pirates de Caraïbes : La Fontaine de Jouvence fait tâche en superproduction affichée. Blockbuster générant plus de deux milliards de dollars depuis le premier opus sorti en 2003, chouchouté par le grand public pour le très prisé Entertainment qu'il célèbre, ces ultimes aventures de Jack Sparrow s'annoncent divertissantes et sensationnelles. Du business Hollywoodien dans toute sa splendeur. Décidément, le comité de sélection cannois nous étonnera toujours :
Mutinerie extrait de Pirates des Caraïbes : la Fontaine de Jouvence
Les long-métrages programmés hors-compétition font souvent s'épancher les cinéphiles sur le sujet ces dernières années : Troie en 2004, Da Vinci Code et X-men 3 en 2006, Ocean's 13 en 2007, Indiana Jones et le Royaume du Crâne de Cristal en 2008, Wall Street : L'Argent ne dort jamais en 2010? Le XXIème siècle annonce la percée d'une ribambelle de suites fédératrices car rassurantes, enclines à ménager le grand public.
Cannes s'attire les regards de l'opinion publique, capte l'attention des grands fans mais aussi des petits consommateurs de 7ème art. Ainsi, la sélection hors-compétition promet de belles montées des marches. Preuve en est faite avec la cérémonie d'ouverture survenue le 11 mai dernier. La programmation de Minuit à Paris répond aux attentes des médias et des spectateurs. Sur leur 31, Woody Allen (un habitué de la sélection), Rachel McAdams et Owen Wilson participent à une ascension minutieusement scénarisée, jalonnée dans un parcours tout tracé pour que nul n'en rate une miette. Attendu comme le loup blanc, Pirates des Caraïbes assure la venue de Johnny Depp et Penélope Cruz mais aussi de tout un amas de starlettes gravitationnelles.
Franchement rémunérateurs au box office, moult films hors-compétitions sont clinquants, brillants et amènent leur lot de célébrités. Pourtant, s'ils gagnent le respect, ces bombes ultra rentables ne traversent pas encore le fossé les séparant des nominés à la Palme D'Or. D'ailleurs, seuls Terrence Malick et son excitant The Tree of Life peuvent exhiber l'étendard d'Hollywood. Et encore, c'est un bien grand mot.
A Cannes aussi l'argent ne dort jamais?
La Croisette représente la deuxième couverture médiatique la plus importante de l'année. En 2007, ils étaient 4500 journalistes, 300 chaines de télévision, 150 radios et 300 photographes. Rien que ça.
Ce port de plaisance en bord de Méditerranée voit son nombre de badauds tripler durant les 12 jours de festivités. Cette année, 130 000 touristes environ foulent les trottoirs cannois. Conséquence de quoi les retombées économiques sont miraculeuses pour la ville : En moyenne, le festival rapporte aujourd'hui près de 200 millions d'euros de chiffre d'affaire. Avec un budget initial de 20 millions d'euros, dont 50% de fonds publics, Gilles Jacob et sa team multiplient la mise de départ par 10. Un bel effort.
Au vu de l'immense espace de visibilité offert durant la période, les sponsors en tout genre gravitent autour de l'évènement et procurent divers services utiles à la bonne organisation d'un évènement de cette envergure. Renault conserve sa place de transporteur officiel des invités, les couturiers les plus nobles font la cour aux plus jolies actrices, celles là même qui arrachent le temps d'une projection enflammée les bijoux les plus chics de leurs fourreaux. La Palme d'or, d'une valeur de 20 000 euros, faite de cristal de roche et d'or 18 carats s'est vue modélisée une seconde fois en 1998 par le joaillier suisse Chopard. Rien n'est laissé au hasard.
L'art pour l'art, précepte aussi noble et altruiste soit-il, n'a plus sa place dans l'occident mondialisé et consumériste. le comité de sélection s'emploie à choisir des films où s'équilibrent qualités artistiques et impact commercial important.
Les Backstages de la Croisette
Nous vous le disions brièvement dans notre point sur Cannes, la face commerciale du festival de Cannes, relativement dérobée aux yeux du public non averti, constitue un élément d'une importance capitale. Crée en 1959, le plus grand marché de film au monde s'impose telle une interface géante composée entre autres de 30 salles équipés en matériel numérique. Un espace où se croisent vendeurs, acheteurs producteurs et institutionnels de l'industrie cinématographique des cinq continents.
Afin d'en faciliter les accès et les interactivités, les promoteurs élaborent en 2004 le Producers Network, une sous-section du marché facilitant la coproduction internationale. En somme, sont proposés au coeur du Village international des infrastructures optimisant les rencontres et conversations pour une complémentarité efficace des métiers mais s'orientant toujours autour d'une même passion.
Cette année, environ 4.000 films y seront présentés aux distributeurs et autres professionnels. Près de 10 000 participants convoitent, échangent, négocient et jonglent avec un chiffre d'affaire total d'un milliard de dollars. Tout cela dans le but d'enrichir le 7ème art des films de demain.
Et le festival de Cannes dans tout ce business ? Les entrepreneurs en possession de l'accréditation "marché du film" ont accès à tout. Probable que bon nombre de ces patrons se rendent à la projection de Pirates des Caraïbes, mais pour le plaisir seulement. Le distributeur devient spectateur, la boucle est bouclée. Et le cinéma de rester un moment à partager.
Sources : Festival-cannes.com et Capital.fr