Tarantino : Le guide ultime des choses à lire ou à voir avant Django Unchained
La sortie de Django Unchained, le nouveau film de Quentin Tarantino, était sans doute depuis longtemps marquée d'une pierre blanche dans l'agenda cinéphile de bon nombre d'entre vous. Voici pour fêter ça dignement une collection de choses à lire et à voir sur le cinéaste le plus passionnant de sa génération...
Le visage de Tarantino s'étale sur toutes les couvertures de la presse culturelle et c'est sur cette information que Le Grand Journal ouvre son interview du 7 janvier dernier. C'est certainement la limite du « phénomène Tarantino ». Tout le monde en parle, parce que... tout le monde en parle. Résultat : ce plateau de rêve prend vite la forme d'un brassage de vide et de sous-information. On assiste alors consterné à la question : « Christophe Waltz, vous avez participé à l'écriture du film avec Quentin Tarantino ? » soldée par un « Euh... Non. » gêné. Le malaise trouvera son apogée dans une dégustation de galette des rois.
Si l'émission de Canal s'est ainsi retrouvée engluée – alors même que, nous allons le voir plus loin, Tarantino est un excellent client – c'est parce qu'elle est restée à la surface en pensant pouvoir se contenter de faire parler son statut de réalisateur culte.
Réalisateur culte. L'expression voudrait résumer à elle seule les raisons de l'engouement exceptionnel pour le cinéaste mais, comme la malette de Marsellus Wallace, MacGuffin mystico-mythique de Pulp Fiction, c'est précisément le contenu et les raisons de ce prétendu culte qui déchainent les passions. Les esprits chagrins pourront bien sûr prétendre qu'il n'y a rien dans la valise... C'est ce qu'on va voir !
En attendant Django
Si chaque nouveau Tarantino est un tel évènement, c'est certes en partie parce que ceux-ci sont relativement rares, mais aussi parce qu'ils réactivent chez les fans une passion fétichiste. Le niveau de connectivité entre ses films et le reste de l'histoire du cinéma est tel que chaque scène, chaque objet, chaque réplique permet d'alimenter des théories sans fin.
Vous vous en rendrez compte en regardant quelques uns des interviews filmés cités ci-dessous, si Tarantino est par essence le cinéaste de la digression c'est aussi parce que c'est sa manière de s'exprimer.
Mais justement, ne nous égarons pas, et revenons au sujet principal.
La place unique que tient Quentin dans le paysage cinématographique mondial est responsable d'un volume considérable d'informations et de discussions. Il est donc indispensable de faire le tri pour trouver quoi voir ou lire d'intéressant à son sujet.
« Avant tout spectateur, et metteur en scène seulement dans un second temps. » Tarantino a ceci de particulier (c'est peut-être aussi sa faiblesse) qu'il ne rechigne jamais à parler dans ses interviews du cinéma des autres. En bon cinéaste spectateur, il aime dispenser son avis sous toutes les formes possibles.
Le top des tops
On trouve ainsi, sans trop de mal, une liste récente de ses films préférés de tous les temps, son top 2011 (ou même son top 2010) ou encore une sélection de ses westerns préférés (voire de ses westerns italiens préférés). On note au passage que, sans aucun doute parfaitement conscient de son statut de prescripteur, il aime varier ses sélections pour citer au final un maximum de titres différents. Dans la vidéo qui suit, il liste (en 2009) ses 20 films préférés sortis depuis qu'il a commencé à réaliser des films (1992) :
La liste des films cités est là.
Quand Tarantino parle de cinéma
Il serait toutefois injuste de limiter sa prise de parole sur le cinéma aux quelques listes qu'il égraine à l'envi. Car ce qui caractérise Tarantino est la passion avec laquelle il parle de cinéma. Pas avare en théories en tout genre, il n'hésite pas à développer son point de vue sur un film qu'il aime ou qu'il déteste ou sur la tournure de la carrière de tel ou tel cinéaste.
A l'occasion, conscient que sa propre trajectoire est un modèle qui fait rêver bon nombre de jeunes cinéastes il lui arrive aussi de dispenser des conseils. Voici par exemple une compilation de 6 astuces pour apprentis réalisateurs.
A longueur d'interviews, et même s'il finit par montrer quelques signes de lassitude sur certains sujets, son enthousiasme débordant fait plaisir à voir. Il faut par exemple le voir présenter Pulp Fiction à Jon Stewart avant la sortie du film en 1994.
Mais quand il s'agit d'entretiens filmés, cette heure passée avec Charlie Rose en 94 (l'interview est présente sur l'édition collector de Pulp Fiction) est sans doute ce qu'on peut trouver de meilleur :
A ce titre les rencontres entre les deux hommes qui ont suivi sont également passionnantes.
Quand ses acteurs parlent de Tarantino
Si vous êtes allergique au débit de Quentin, vous préférerez peut-être écouter les autres parler de lui. Voici par exemple un superbe hommage de Brad Pitt en 5 chapitres non-linéaires :
Le speech hilarant de Pitt, contient quelques courtes imitations du cinéaste au travail. C'est, il faut l'avouer, assez réussi, mais ça ne vaut pas celle de Samuel L. Jackson lors de son passage à Inside The Actor's Studio. Dans un autre registre, le point de vue de Pam Grier sur le réalisateur vaut également le détour.
Tarantino sur le divan
Si Quentin est intarissable sur le cinéma, il est en revanche généralement plus discret concernant sa vie perso. Il y a quelques semaines, il s'est toutefois abondamment confié à la star de radio Howard Stern. Plus d'une heure de conversation extrêmement détendue dans laquelle il évoque son enfance, l'absence de son père, la mort de sa monteuse Sally Menke et même quelques détails de sa vie sexuelle...
On n'apprend ici rien de véritablement neuf, les détails biographiques le concernant dans Rebels on the backlot, l'ouvrage de Sharon Waxman consacré aux cinéastes stars de sa génération, étaient déjà très précis, mais le voir se livrer ainsi en vidéo est assez stupéfiant.
Mindfuck theories
Je l'évoquais plus haut, il existe de nombreuses théories et élucubrations de fans autour des films de Tarantino. L'une des plus fondamentales projette l'existence d'un Tarantino Universe, une réalité parallèle cohérente dans laquelle se déroulent les histoires de ses films.
La théorie est confortée par l'existence de marques fictives comme les cigarettes Red Apple que l'on retrouve d'un film à l'autre ainsi que par des personnages communs à plusieurs films. Selon cette théorie, on peut par exemple imaginer que dans l'univers dans lequel se situe Pulp Fiction et Reservoir Dogs, le déroulement d'Inglourious Basterds correspond à la réalité historique.
Un sympathique court-métrage brésilien a même été réalisé sur le sujet :
Dans un autre genre, voici deux théories assez sidérantes que je vous invite à découvrir : Pulp Fiction serait un film sur l'histoire de la musique aux Etats-Unis (pendant que vous y êtes, vous pouvez également lire cet excellent texte expliquant pourquoi Tarantino est un cinéaste hip hop) et dans Kill Bill, en réalité La Mariée ne tue pas Bill.
Analyse et critique
Les textes d'analyse et les critiques de films de Tarantino sont évidemment légions. Voici donc une sélection de ce qu'on peut trouver de plus intéressant. On commence avec cette vidéo (courte pour changer) du critique britannique Mark Kermode évoquant des réserves légitimes sur l'évolution du cinéma de Tarantino après Jackie Brown :
On trouve également sur le web : une réflexion sur le temps à propos de Boulevard de la mort, une étude de l'utilisation de Stuck in the middle with you dans la scène de torture de Reservoir Dogs, une analyse des deux volumes de Kill Bill rassemblés, le décryptage de l'introduction du personnage de Marsellus Wallace dans Pulp Fiction, une analyse de Boulevard de la mort, un beau texte sur Tarantino et les femmes, la critique de Boulevard de le mort par les Cahiers du cinéma,
Pendant longtemps, les rayons de librairie ne proposaient pas grand chose d'intéressant sur le cinéaste. Normal, peut-être, pour un réalisateur qui sort cette année seulement son septième film. Les choses sont toutefois en train de changer avec la sortie en mars 2012 du Musée imaginaire de Quentin Tarantino (que je n'ai pas encore lu) et celle, dès le 17 janvier, de Quentin Tarantino un cinéma déchaîné.
Ce dernier ouvrage, édité par Capricci (à qui l'on doit notamment un bon livre d'entretiens sur Apatow et un essai intéressant sur Fincher), rassemble une petite dizaine de textes sur les différents films de Quentin. Mention spéciale à un texte de Pascal Bonitzer initialement publié dans la revue Trafic en 1995 qui, passé le propos introductif un peu « vieux con » théorise assez bien le fonctionnement du cinéma de Tarantino.
Le grand mix
Voici pour terminer quelques liens en vrac plus connus ou moins indispensables : une très chouette timeline signée Miramax représentant la carrière de Tarantino, une photo de Mr. Brown rencontrant l'autre Mr. White, une compilation de plans vus du coffre et une autre amendée du plan vu du corps d'Inglourious Basterds, un gif de Tarantino qui crache son champagne aux Golden Globes, une compilation chronologique de TOUTES les références culturelles dans les films de Tarantino, Tarantino parlant de sa monteuse Sally Menke, Tarantino qui explique que le twist de Mia dans Pulp Fiction était influencé par Les Aristochats (avec démonstration à l'appuis), la célèbre interprétation sous-texte de Top Gun dans Sleep with me, une jolie manucure aux couleurs des films de Quentin et puis, bien sûr, l'incroyable vidéo The Tarantino mix-tape montée à partir de musiques et d'extraits de ses films :
Vous avez sans aucun doute d'autres liens à nous faire découvrir, n'hésitez pas, les commentaires sont là pour ça.
Après Django...
Pour ne pas gâcher le plaisir de la découverte du film en salles, ce qui suit est plutôt à voir après le film :
- Notre longue analyse de Django Unchained
- Un article signé Tarantino lui-même dans lequel il dévoile en détails la recette appliquée à Django Unchained.
- Une interview fleuve, traduite par Slate.fr, qui a fait polémique à cause des déclarations de Tarantino concernant John Ford, mais qui reste passionnante par ailleurs.
- La BO complète de Django Unchained et sa version commentée.
- Une théorie rigolote sur le costume bleu de Jamie Foxx.
- La preuve que Django est situé dans le Tarantino Universe.
- Un article sur les potentielles 2 heures de coupes de Django Unchained.
- La conférence de presse du film.
- Les micro-critiques de Django Unchained sur Vodkaster.
Les images illustrant l'article sont des photos 'behind the scenes' assez rares, mises en ligne dernièrement par Miramax.
Je ne sais même pas pourquoi je continue à écrire.
(Quand on voit le discours d'Eastwood pour Romney on se dit qu'il aurait dû demander l'avis d'un conseiller en com').
En tous les cas, c'est pas Gilles Lelouch qui nous aurait sorti un discours comme ça !
L'interview par ces guignols de Canal + (c'était facile...) et sous-journalistes était ridicule.
Le petit bouquin vendu dans l'édition DVD au format bible de Pulp Fiction était assez instructif sur les gimmicks de QT et les sens cachés de certaines scènes.
Merci d'avoir souligné la nullité des questions de l'interview au Grand Journal que quiconque ayant potassé un peu la carrière du bonhomme n'aurait jamais posé. Sans compter que l'émission est toujours une usine à spoil.