Venise 2012 - Jour 7, Spring Break forever bitches !
Nous voilà au jour 7, jour de la projection de Spring Breakers d'Harmony Korine, un film sidérant qui dépasse ses promesses grâce à une technique narrative passionnante...
Le film du jour de la veille
Rien à foutre, maintenant je reste. On est bien là, à Venise, avec "my men" les critiques de cinéma (désolé, mais cette expression ridicule est très en vogue sur le Lido). On voudrait que ça dure toujours. Certes, nos soirées sont moins endiablées que sur les plages filmées par Korine, mais les films sont là - tous les jours - pour nous changer un peu du réel. Le spring break relève de cette échapée bizarre d'un monde toujours pareil.
Spring Breakers d'Harmony Korine
4 nanas (3 blondes délurées et une brune plus gamine) partent accomplir en Floride cette tradition US de la pause de printemps. Alcool, drogue et fêtes hyper-sexuelles. « Une expérience spirituelle. », dira Faith (Selena Gomez), jeune croyante au visage poupin, pour décrire ses nuits de débauche à sa grand-mère. La formule peut faire sourire, mais la jeune fille est sincère.
Spring Breakers © Mars Distribution
Ce subtil mélange de ton entre un décalage comique assumé et une profonde sincérité trouvera plus tard son apogée dans une séquence pop absolument géniale dont il serait criminel de dévoiler davantage. La subversion, s'il faut en trouver, ce n'est pas filmer des rails de coke sniffés à même le ventre d'une jolie nymphette, c'est traiter le futile avec sérieux et intelligence.Les camarades du groupe de prière de Faith l'avaient mise en garde avant son départ pour St. Pete Beach : « You're gonna pray, you're gonna pray hardcore. », mais elles n'imaginaient pas que le "trip" puisse-t-être à ce point mystique.
La grande réussite de Spring Breakers est de croire en son sujet avec autant de foi que tonton Malick pour la vie et l'amour. La référence n'est pas gratuite tant la filiation, qu'on pouvait déjà déceler dans Gummo, semble désormais évidente. Spring Breakers repose sur le même système narratif que To the Wonder. Ce montage éliptique allant d'avant en arrière, montrant l'impact d'une balle avant qu'elle ait été tirée, superposant des lignes de dialogue et des monologues intérieurs en off, a pour effet de dilater le temps au point de nous en faire perdre la notion. « Spring Break ! Spring Break forever bitches ! » à force d'être ressassé, le voeux pieux se réalise dans le montage : une impression d'éternité.
En découvrant les premières images du film il y a quelques mois, on pouvait craindre qu'il se limite à traiter de manière conventionnelle son appêtissant argument de vente : pervertir l'image proprette des filles de Disney Channel pour en faire des Girls gone wild. Mais Korine n'a pas cédé à la facilité. En plus d'une véritable proposition formelle, il construit avec Spring Breakers un récit initiatique aux échos féministes. Chacune choisit, en bien ou en mal, son destin. Jamais leurs actes ne sont déterminés par les hommes. Le triomphe de cette féminité souveraine est l'une des plus belles réussites du genre depuis Boulevard de la mort.
Le point culture
Le générique de Spring Breakers bénéficie d'un style un peu particulier hérité de la culture "Sea Punk" (merci à Raphael Clairefond de nous en avoir signalé l'existence).
Ce style issu du web est difficilement définissable, mais se caractérise par un amour des dauphins et des dégradés mauves. Cette culture, fondée sur une conviction ironique, illustre à merveille l'ambiguïté du film maintenant un équilibre constant entre premier et second degré.
La scène du jour : Réminiscence
Scrupuleuse reconstitution historique de la campagne de Napoléon Bonaparte au Portugal, Les Lignes de Wellington est le dernier film écrit et préparé par Raoul Ruiz avant qu'il ne décède. Il fut donc terminé par sa femme, Valeria Sarmiento. Une foultitude de personnages - soldats, généraux et civils - s'y croisent sans cesse. Ils luttent pour survivre, pillent et violent parfois, ou fuient pour espérer rejoindre le front et se battre face aux envahisseurs français. Comme ce jeune homme qui se remet tout juste d'une balle prise en pleine tête : alors qu'il déboule dans une demeure où il espère pouvoir se cacher, un laconique et radieux mouvement de caméra ranime un passé perdu. Celui de l'enfance du personnage sans doute ; ou peut-être rêve-t-il seulement de ce qui a pu se passer en ces lieux. Un enfant tend la main pour attraper du raisin, sa mère le couve du regard, la caméra l'accompagne dans son geste. L'instant d'après les murs se sont obscurcis, la candeur de l'enfant a disparu et il se retrouve seul. Splendeur d'un moment de communion entre une mère et son enfant, une réminiscence qui serait là pour donner un peu de courage avant de retourner aux affres la guerre.
Photos de la conférence de presse
Harmony Korine, ironiquement mystique ?
James Franco, pensif ou charmeur ?
Dans l'ordre Vanessa Hudgens, Rachel Korine, Ashley Benson et Selena Gomez qui, par rapport au film, ont inversé la proportion blondes/brunes.
Vidéo de la conférence de presse
Tout le casting et le réalisateur de Spring Breakers étaient là pour répondre aux questions des journalistes dans une salle aussi bondée que pour celle de The Master. Bien plus agréable que son collègue Paul Thomas Anderson, Harmony Korine et ses girls méritaient bien une petite vidéo (filmée par nos confrères d'Accreds dont la critique du film est à lire ici) et montée par nos soins.
Si vous restez jusqu'au bout, vous aurez droit à un bonus James Franco qui répond par conférence de presse interposée à ce que Michael Shannon avait dit de lui il y a quelques jours.
Photos : © David Honnorat
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IMtheRookie6 septembre 2012 Voir la discussion...
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bonnemort6 septembre 2012 Voir la discussion...
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Brazilover6 septembre 2012 Voir la discussion...
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IMtheRookie7 septembre 2012 Voir la discussion...
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cribeyre28 janvier 2013 Voir la discussion...
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IMtheRookie28 janvier 2013 Voir la discussion...
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cribeyre28 janvier 2013 Voir la discussion...
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cribeyre28 janvier 2013 Voir la discussion...
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IMtheRookie19 février 2013 Voir la discussion...
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cribeyre20 février 2013 Voir la discussion...