Avoir des palmes n'empêche pas de couler si on ne sait pas nager

Les Palmes d'or oubliées

Festival / Récompenses | Par Marie Piot | Le 22 mai 2011 à 11h00

Dans quelques heures, le 64ème festival de Cannes termine sa course dans le tourbillon des remises de récompenses, parmi lesquelles celle de la tant attendue Palme d'Or. En lice cette année, 20 candidats tous plus méritants les uns que les autres (ou pas) rêvent de la reconnaissance suprême. Bien sûr, il n'en restera qu'un. Et les autres d'accepter avec courtoisie les remerciement d'usages en bons perdants.

Pourtant, force est de constater que certaines oeuvres déclarées meilleur film de l'année tombent dans l'oubli dès lors qu'elles sortent dans nos salles. On se souvient des merveilles telles que Pulp Fiction, Le Guépard, Apocalypse Now, Sailor et Lula, Le Pianiste et Taxi Driver, mais seriez-vous capables de situez sans effort l'action de La Parole donnée, La Méprise, L'éternité et un jour, tous trois Palmes d'or en 1962, 1973 et 1998 ? Pas sûr?
Retour thématique sur quelques méconnus primés, histoire de palier ces lacunes que nous ne saurions assumer en société.

La double palme peu lucrative : Le Goût de la cerise et L'Anguille en 1997
A plusieurs reprise, le jury n'a pu se résigner à jouer les arbitres jusqu'au bout. En témoignent Le Goût de la cerise et L'Anguille qui, en 1997, s'emparent ex-æquo de la première place du classement. Le premier film, iranien, évite de justesse la censure dans son pays ; le second quant à lui révèle une part importante des faux-semblants de la société nippone. Deux entreprises politiques donc, respectivement menées par Abbas Kiarostami et Shohei Imamura (son deuxième triomphe à Cannes après La Ballade de Narayama en 1983) ayant bénéficié finalement du contexte international dans lequel baignait le festival à l'époque. Au final, ces oeuvres ne récolteront que 160 000 entrées en France chacun.

Le réalisateur palmé qu'on a un peu oublié : Bille August
En voilà un encensé non pas une, mais deux fois par le jury du Festival de Cannes. Grâce à Pelle le conquérant (que le réalisateur présente ici) et Les Meilleures intentions, ce cinéaste danois peut fièrement brandir l'imposant trophée en 1988 et 1992 et de fait, briguer le succès commercial qu'il mérite. Malheureusement, le public français ne suit pas : si Pelle le conquérant sauve les meubles en attirant 621 000 spectateurs en salles obscures, la seconde réussite n'enregistre que 91 000 entrées quatre ans plus tard. Des drames sociaux trop académiques pour parler au public ?

La Palme qui n'a pas cartonné malgré un gros casting : L'Épouvantail en 1973
Avec 20 Palmes d'Or à son actif, les productions nord-américaines imposent (ici aussi) leur leadership, loin devant les Français (11) et les Italiens (10). Ainsi, lorsque L'Épouvantail de Jerry Schatzberg remporte le Grand Prix (ancienne Palme), il ne fait que confirmer l'hégémonie du cinéma d'outre-Atlantique. Sans compter qu'avec Al Pacino et Gene Hackman au casting, ce road movie déjanté ne peut qu'attiser les curiosités :


Attirer l'attention extrait de L'Épouvantail

Force est de constater que L'Épouvantail n'a pas marqué les mémoires. Et si son auteur revient sur les devants de la scène aujourd'hui, c'est étonnamment grâce à ses talents de photographe. La photo qui enflamme la croisette en 2011, c'est la sienne !

Le deuxième gagnant de la double Palme d'Or occulté par le premier : Ces messieurs dames
1966, le jury, présidé par Sophia Loren, réitère en élisant deux gagnants lors de la 19ème édition du festival de Cannes. Ces messieurs dames, comédie de moeurs italienne signée Pietro Germi,reçoit un accueil plus que mitigé si l'on se réfère aux sifflements entendus lors de sa projection sur la Croisette et ses 160 000 tickets vendus à sa sortie en France. Face à ce film Un homme et une femme de Claude Lelouch, de par sa tendre et simple perception de l'amour vrai, rafle effectivement la même mise lors de la cérémonie de clôture, mais comptabilise plus de quatre millions d'entrées en salles.

Alors certes, Le Festival de Cannes s'évertue à féliciter les initiatives originales en matière d'esthétique et de scénario, mais il ne peut, ce en connaissance de cause, négliger l'angle économique du 7ème art, sous peine d'être rangé dans la collection des évènements cinématographiques élitistes. Pire, son administration prie chaque année pour que nous, humble public imprévisible, trouvions satisfaction dans son palmarès. Ainsi, en 2010, le Grand Prix du jury Des hommes et des dieux trouve grâce aux yeux des amateurs (il est jugé film le plus rentable de 2010 avec 3,1 millions d'entrées), loin devant la Palme d'Or thaïlandaise Oncle Boonmee, celui qui se souvient de ses vies antérieures (150 000 spectateurs). Ne reste plus qu'à attendre, attendre avec patience ce que Robert De Niro nous aura concocté cette année.

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