Or Noir : les dessous du nouveau film de Jean-Jacques Annaud

Or Noir, la nouvelle fresque historique de Jean-Jacques Annaud avec un casting international très glamour (Tahar Rahim entouré d'Antonio Banderas, Mark Strong et Freida Pinto) sort en salles ce mercredi.

Bon, très bien, mais vous vous demandez sans doute « C koi le pitch ? ». On y vient. Le film retrace le conflit de deux seigneurs arabes au moment de la découverte du pétrole par des texans sans scrupule dans les années 30. Tahar Rahim, tout juste sorti de son rôle de jeune algérien rebelle dans Les Hommes libres, y interprète un jeune prince cultivé qui se lancera dans une guerre de longue haleine pour unir les deux royaumes et prendre en main la destinée de son peuple.

Conflit entre tradition et modernité, ascèse et opulence, culture occidentale et orientale... Tout y est, mais qu'on ne s'y trompe pas, c'est bien l'aventure (riche en rebondissements), l'action guerrière (honorablement filmée) et la romance (assez convenue) avec une belle princesse qui priment. Après le bide intersidéral de Sa Majesté Minor, Jean-Jacques Annaud revient à ses premiers amours : le grand spectacle exotique et juvénile le plus académique (type Sept ans au Tibet), afin de fédérer un public familial qui ira chercher dans les salles obscures la chaleur et le soleil que l'hiver se refusera probablement à lui accorder. Annaud l'assume en grand enfant jouissant de son coffre à jouets à taille réelle, et remplit donc avec zèle sa mission d'entertainer, peintre kitsch de paysages grandioses et de personnages tourmentés.

En attendant de juger par vous-même cette tentative de rivaliser avec le Lawrence d'Arabie de David Lean, vous pouvez jeter un oeil au long making-of (c'est à la mode) :

Une belle machine promotionnelle qui s'évertue dans un premier temps à justifier ce casting assez peu arabophone. Ainsi apprend-t-on notamment que Messire Banderas est né en Andalousie et que donc il a sûrement un peu de sang basané dans les veines. On y découvre ensuite tout le soin apporté aux décors, aux costumes, etc. Tarak Ben Ammar, producteur du film, vous raconte la merveilleuse aventure du film qui s'est tourné dans ses immenses studios d'Hammamet (Spielberg y a tourné Les Aventuriers de l'arche perdue) au moment où éclata la révolution tunisienne.

Acteurs, producteur et réalisateur reviennent en détail sur ce tournage tumultueux avec une équipe tiraillée entre ses espoirs, ses craintes et leur devoir professionnel à accomplir. Finalement, tout le monde sera rapatrié et Annaud terminera le film plus tard avec une équipe réduite. Les liens entre le passé de la fiction et le présent du réel se font naturellement dans leur esprit. Rappelons tout de même que Ben Ammar était un des grands amis de Ben Ali...

Derrière ce type de discours promotionnel assez convenu et consensuel se cache parfois une réalité moins enthousiasmante dont nous parle nos confrères d'Ecran Noir : lors de l'avant-première du film, des salariés d'LTC, laboratoire de tirage photochimique de cinéma détenu par Tarak Ben Ammar ont protesté car ils n'ont pas été payés en octobre. La société, subissant de plein fouet l'essor du numérique au détriment de l'argentique, se trouve actuellement en cessation de paiement. Le syndicat de la société affirme également que « la société Quinta Communication (dont LTC est une filiale) avait imposé aux ouvriers et techniciens de travailler en qualité d'expatriés via une société tunisienne, ceux-ci ne bénéficiant alors d'aucune couverture sociale et conventionnelle ». En dépit de l'avis négatif de la commission de professionnels, le CNC a décidé d'accorder l'agrément qui permet de distribuer le film qui sort en salle demain, mercredi 23 novembre.

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Source : Ecran Noir / Image : © Warner Bros. France