Que faut-il à un personnage pour qu'il mérite son spin-off ?
Qu’est ce qui est jaune, vif, attendrissant et sort cette semaine dans les salles de cinéma ? Un Minion. Après avoir agi dans l’ombre de M. Gru, ces petites créatures jaunes - qui avaient tendance à lui voler la vedette - sont à la tête de leur propre film. En attendant 2016, et la sortie du troisième épisode de Moi, moche et méchant, les studios jouent du spin-off. Entre les innombrables annonces de films dérivés de Star Wars - dont celui sur Han Solo - ou encore Fear The Walking Dead cet été, d'après The Walking Dead : on ne compte plus les spin-off en salles ou sur le petit écran. Venu des comics, cette tendance à prendre des personnages secondaires d’une oeuvre originale pour en faire les personnages principaux d’une autre, ne cesse de s'étendre. Mais que faut-il à un héros de l'ombre pour avoir son propre spin-off ?
Grâce au spin-off, les studios mobilisent la curiosité d'un public déjà conquis et limitent les risques financiers. Les héros de spin-off ont en commun d'être remarquables et remarqués dès leur première apparition, sans qu'on les connaisse bien pour autant. Ils ont ainsi un potentiel énorme pour devenir des têtes d'affiches. On en distingue plusieurs catégories.
Le maladroit attachant
Aussi embarrassant qu’attendrissant, le maladroit fait de ses impairs, une force. A l'exemple de Dory dans Le Monde de Nemo, le poisson amnésique qui n’a rien à envier à Marin et l'accompagne bon gré mal gré dans sa quête pour retrouver son fils. Dans une interview annonçant la sortie du Monde de Dory pour l'été prochain, John Lasseter a même reconnu : « Je ne pense pas qu’on ait déjà créé un personnage aussi attrayant que Dory ». Attrayante, Dory l'est grâce à son humour.
L'humour, c’est également le trait de caractère des Minions. Ces êtres jaunes et tordants ont pour seul objectif de servir le maître le plus méchant de la Terre. Malheureusement, à chaque fois, les maitres périssent à cause des maladresses des Minions ; une maladresse qui revêt un caractère comique et confine à la bêtise. Maladroit ou stupide, telle est la question, mais la réponse importe peu, tant ce type de personnage fait mouche. La preuve : après 10 ans de Central Perk, seul Joey - l'imbécile de la bande de Friends - s'est démarqué pour poursuivre l'aventure en solo, avec une sitcom à son nom.
L'homme mystère
Saul Goodman est le personnage mystère type. Si l'avocat véreux électrisait Breaking Bad avec ses punch lines hilarantes, ses zones d'ombres étaient suffisantes pour alimenter une série autonome. Lever le voile sur ce personnage mystère, c'est ce qu'a permis de faire Better Call Saul, et ce n'est pas un exemple isolé. Cela fait bientôt 20 ans que la mode des suceurs de sang perdure, lancée pour les midinettes des 90's avec Buffy contre les vampires, l'histoire d'une adolescente affrontant les forces du mal au péril de sa vie. Et sur la route sentimentale de l'héroïne, on rencontrait deux personnages que tout opposait : Spike et Angel.
Et même si Spike possédait une énorme fanbase, les producteurs lui ont préféré Angel, personnage aussi torturé qu'énigmatique, pour faire l'objet d'un spin-off. En se dissociant de Buffy, Angel n'a pas eu à pâlir de la comparaison puisqu'il a tenu tout de même 5 saisons. Les tourmentés auraient-ils la côte ? Au cinéma, le torturé Wolverine tire son épingle du jeu. Et c'est avec X-Men Origins : Wolverine, entre préquel et spin-off - la frontière est devenue fine - qu'on découvre la naissance de ce héros.
Le fils prodigue
Le spin-off, c'est l'occasion de passer le flambeau. Dans Evan Tout-puissant, Steve Carell saisit l'opportunité de prendre la suite de l’inimitable Jim Carrey. Harcelé par Dieu, Evan Baxter, membre du Congrès américain, se voit dans l’obligation de construire une nouvelle arche de Noé, en vue d'un déluge imminent, et ce malgré les railleries de ses concitoyens. Dans Creed, en salles en novembre prochain, une toute autre passion lie le père au fils : la boxe.
Adonis Johnson Creed n’a pas connu son père, le célèbre champion du monde poids lourd Apollo Creed dans Rocky, décédé peu temps avant sa naissance. Mais sous l’aile du rival et meilleur ami de son père, Rocky Balboa, Apollo tente à son tour de remporter le titre... Rien de mieux que la mise en scène d'une relation père-fils, d'un héritage, pour justifier l'existence d'un spin-off, sauf qu'à force d'en user et d'en abuser, l'opération tourne au recyclage des personnages et des situations, vidant la seconde oeuvre de tout sens, au risque de déteindre sur la première et la dévaluer rétrospectivement.
Le prétentieux
Quel est le point commun entre le Chat Potté et Les pingouins de Madagascar, en dehors de l'animation? Ces personnages secondaires sont aussi irrévérencieux qu'attendrissants et ils sont parvenus à surpasser leurs redoutables partenaires ou adversaires pour avoir l'opportunité de vivre leurs propres aventures. La prétention, c'est un des traits caractéristiques du personnage de spin-off.
Intelligent et méprisant à la fois, Magneto a d'ailleurs presque emprunté le même chemin que Wolverine. Il n'a pas encore de spin-off à son nom, mais X-Men : le commencement accorde tellement d'importance à sa transformation en ennemi des humains, qu'on ne peut en douter : les méchants peuvent faire d'excellents héros de films dérivés.
Les absents
Bon nombre de personnages de films d'animation pourraient avoir leur spin-off. Les aliens de la saga Toy Story qui s'apparentent aux Minions, tant au vu de leurs répliques que de leur inlassable recherche d'un maître, mais également l'Âne de Shrek, compte-tenu de sa force comique et de sa bienveillance.
Dans le domaine du spin-off, les femmes, elles, n'ont pas encore eu rendez-vous avec le succès. Alors après Elektra et Catwoman, deux échecs, pourquoi pas une adaptation autour de Hit-Girl, de Kick-Ass ? Le film s'était démarqué par son duo masculin-féminin, mais puisque que Chloë Grace Moretz n'est plus une adolescente, on pourrait très bien envisager un 3ème épisode, uniquement de son point de vue.
Côté séries, la longévité d'Entourage est dûe aux personnages secondaires, et tout particulèrement à Ari Gold, l'agent timbré de l'acteur Vincent Chase. A coup de crises démentielles, d'actes invraissemblables, d'insolence et d'impertinence, Ari s'est fait une place dans le coeur des spectateurs et des critiques, si bien que son interprète Jeremy Piven s'est vu remettre entre 2006 et 2008 l'Emmy Awards du meilleur second rôle masculin dans une série télévisée. Alors sur le modèle de Better Call Saul, pourquoi pas un prequel sur ses débuts d'agent d'acteurs à Hollywood ? Et vous, quel spin-off aimeriez-vous voir ?
@ChrisBeney Mon côté Sorrentino, probablement.