The Karate Kid, de John G. Avildsen : le teenage underdog
Réalisé par John G. Avildsen, et reprenant la même trame "underdog" (raté/loser sous-estimé, en gros le contraire de favori), The Karate Kid pourrait bien être vu comme un remake teen de Rocky.
De tous les teen movies des années 80, c'est sans doute un de ceux qui a le plus mal vieilli. C'est aussi parce que c'est l'un des plus populaires et que, jusqu'au remake de cet été, il continuait à avoir droit à un certain nombre de rediffusions, tant l'histoire racontée a marqué au fer rouge une partie de la jeunesse des années 80 et 90.
Autant vous prévenir : dans la mesure où ce dossier est dédié aux films des années 80, pensez bien que le reproche « c'est ringard » n'est pas recevable chez moi. Certes, Daniel Larusso s'habille avec des chemises de bûcheron, associées à des pantalons army et à des rayban aviator ; et oui, il se fait tabasser sur fond de Bananarama ; et oui, quand il part en date, c'est à « Golf n'Stuff », à tel point qu'on a du mal à croire qu'il ait quand même réussi à emballer après un truc pareil, mais...
Le date le plus kitsch de l'histoire du cinéma extrait de Karate Kid
Mais c'est le pacte qu'on passe avec ce film quand on décide de le regarder. Il a été tourné en 1984, s'adressait à un public adolescent de 1984, et montrait par conséquent ce qui était over-the-top cool en 1984 quand on avait 13-15 ans (y compris Golf n'Stuff, donc). Pensez donc à tous ces jeunes qui se sont mis au karaté après avoir vu le film !
The Karate Kid, c'est l'histoire de Daniel Larusso (Ralph Macchio, qui avait 23 ans mais semble être étranger au phénomène de vieillissement tant on lui donne réellement 15 ans), un adolescent italo-américain, un brin petite frappe, un brin antipathique. Il déménage de son Newark natal (dans le New Jersey, sur la côte Est des Etats-Unis - Newark, ça craint, c'est l'emblème de la ville dangereuse, mal famée et pourrie, aux Etats-Unis) pour aller s'installer avec sa mère célibataire à la Reseda, un quartier pas génial de Los Angeles, sur la Côte Ouest. Fils d'immigrés, il vient des mauvais quartiers, et son adaptation dans cette Californie où tout le monde est beau, riche et sympa ne se fait pas sans heurts. Alors qu'il rencontre la jolie Ali (Elizabeth Shue), il se met à dos l'ex de celle-ci, Johnny Lawrence (William Zabka) et tout son gang de blonds surentraînés au karaté dans un dojo quasi-militaire, les Cobra Kaï. L'adaptation dans son nouveau lycée en devient nécessairement musclée, puisqu'il est constamment persécuté par ses nouveaux ennemis et lâché par ses nouveaux amis. Exclu, faible et isolé, il se referme sur lui-même, jusqu'à ce qu'il noue une amitié assez improbable avec l'homme d'entretien de son immeuble, un Japonais un peu étrange, « Mr. Miyagi » (Pat Morita). Lors d'un énième passage à tabac par les Cobra Kaï, Mr. Miyagi vient au secours de Daniel.
Poursuivi par un gang de squelettes karateka extrait de Karate Kid
Il le prend sous son aile et lui promet de lui enseigner le karaté pour lui permettre de vaincre les Cobra Kaï lors de l'imminent All Valley Karate Championship. L'enseignement de Miyagi à « Daniel-San » révèle le karaté, non plus comme un sport de combat, mais comme une philosophie de vie, un appel à la sagesse et à la mesure. Daniel-san apprend le karaté, non pas pour se battre, mais pour ne plus avoir à le faire, pour s'accepter, se faire accepter et ne plus avoir peur d'aller au lycée.
Une des critiques les plus fréquentes à l'encontre de Karate Kid, c'est la faiblesse du karaté stricto sensu, ce qui est dommage, nous dit-on, compte tenu du titre. Et c'est pas faux : voir ce gringalet de Daniel Larusso démonter la tête de grands blonds musculeux issus probablement d'une expérience nazie avec son ridicule « crane kick » et ses nettoyages de bagnole (le légendaire « wax on, wax off »), ça ne tient pas la route. Mais Karate Kid est bien plus un teen movie qu'un film d'arts martiaux. Le sport ici, sert à véhiculer une autre histoire, celle de l'affirmation d'un gosse, de la création d'un individu. Jusqu'ici, le sport apparaissait en général dans les teen movies comme le pré-carré des jocks, ces sportifs décérébrés par l'esprit d'équipe propre aux sports collectifs du lycée, au mieux complètement stupides, au pire, ce sont des bully bastards - les Cobra Kaï étant dans le prolongement de ce cliché. Avildsen a une autre approche ici.
L'expression « karate kid », c'est avant tout un terme dérogatoire, un sobriquet. C'est la façon péjorative qu'ont les ennemis de Daniel Larusso de se foutre de lui, des minables cours de karaté qu'il a suivi à la MJC de Newark, et des raclées qu'il se prend continuellement. Un peu comme Rocky était moins un film sur la boxe que le portrait d'un raté qui vaut mieux que ce qu'on donnait de lui, Karate Kid est le portrait d'un adolescent paumé et martyrisé, qui a perdu tous ses repères, et qui se reconstruit grâce au soutien d'une figure paternelle de substitution. Le sport est avant tout ce qui permet à un individu de montrer sa valeur. Dans ce schéma, finalement, le karaté n'est qu'un élément secondaire dans l'enseignement de Mr. Miyagi.
Wax on, wax off extrait de Karate Kid
Ce que recherche avant tout Daniel dans le karaté, c'est la reconnaissance et le respect. Sorti en 1984, Karate Kid est sans doute un des premiers films grand public à mettre en scène une famille monoparentale et surtout à en utiliser le schéma pour montrer l'insécurité d'un gamin et sa perte de repères. Déraciné de son milieu géographique et social, « Daniel-san » est aussi paumé à la maison, il ne trouve de répit et de protection nulle part. Il est élevé par une mère célibataire visiblement dépassée par les événements, il cherche à plaire à une fille hors de sa portée. Ce n'est pas une mince affaire quand on se fait régulièrement humilier publiquement, et ce, même si Ali est de très loin le personnage de blonde californienne populaire le plus gentil de l'histoire du cinéma. Il faut y ajouter la colère et surtout la peur, pour compléter le tableau. En ce sens, le championnat est un succès pour Daniel puisque, non content de foutre une raclée à la plupart de ses tortionnaires, il reçoit la vraie gratification qui fait aboutir le film : entendre de la part de Johnny Lawrence un très simple « you're alright, Larusso ! ».
Le "crane kick" extrait de Karate Kid
Karate Kid, c'est donc avant tout l'histoire d'un gamin paumé, qui a besoin du coup de pouce qui lui redonnera confiance et lui permettra de reconstruire ses repères. Coup de bol donc, que ce janitor / star du karaté, me direz-vous. Pourtant, derrière les grosses ficelles, le personnage de Mr. Miyagi est au passage un des aveux d'échec d'intégration les plus retentissants produits par la culture populaire américaine. Mr. Miyagi est révélé peu à peu comme un immigré nippo-américain installé à Hawaï, qui a combattu avec l'armée américaine en 1941, mais dont la femme a été néanmoins placée en camp par les Américains pendant la guerre. Il a depuis tout perdu et vit une petite vie effacée et sans saveur. La rencontre entre Daniel-san et Mr. Miyagi apparaît ainsi comme bien plus qu'une relation maître-élève ou une amitié improbable. C'est une cellule familiale qui se recrée entre un père sans enfant et un enfant plus ou moins abandonné par ses parents, et c'est là que se situe la vraie force du film.
C'est l'alchimie entre Macchio et Morita qui donne sens à cette histoire qui, en effet, ne brille pas par la précision et la chorégraphie des combats. Le karaté est un liant, puisque c'est le moyen par lequel un adulte montre à un enfant comment faire face au monde seul. D'ailleurs, Miyagi ne s'y trompe pas, lorsqu'il fait remarquer à Daniel-san qu'il n'y a pas de mauvais enfants, seulement de mauvais éducateurs. Ce qui compte ici, c'est la construction des personnages, et le lien qui se tisse entre eux. C'est bien connu, un personnage bien construit excusera toujours des faiblesses et des facilités de scénario. Le personnage de Miyagi illumine le film, avec son humour décalé et son timbre de voix réconfortant. Pat Morita, 100% américain, et dont les faits d'arme sont plus de l'ordre de Happy Days que de La Fureur du Dragon, récupère son patronyme nippon pour le film, Noriyuki, et se crée un accent et une diction venus du pays du Soleil Levant - et sans doute un brin empruntés à Yoda, qui avait déjà séduit petits et grands dans L'Empire Contre-Attaque, 3 ans plus tôt. Il y gagnera une nomination à l'Oscar du meilleur second rôle en 1985, et une place de choix comme monument de la culture populaire adolescente américaine.
Porté par une musique de Bill Conti (qui avait déjà collaboré avec Avildsen sur Rocky, on ne change pas une équipe qui gagne), le film a été un des plus grands succès critique et populaire de 1984, ce qui fut à la fois une bonne et une mauvaise chose. Une bonne chose car, quand un film familial est aussi réussi, ce serait dommage de bouder son plaisir. Une mauvaise chose car, si Avildsen fait de très bons films, il fait aussi de bien mauvaises suites. La fin prévue initialement pour le film - où Miyagi foutait une trempe d'anthologie au sensei des Cobra Kaï - fut placée finalement au début d'une suite, qui perd toute la richesse de ce premier volume, pour devenir un alignement de clichés sur le Japon de nos ancêtres.
Karate Kid 2 n'est plus un teen movie, mais devient réellement un film d'arts martiaux raté. Et que dire de Karate Kid 3, si ce n'est que ça ressemble à s'y méprendre à un trop long épisode de Baywatch meets Le Rebelle meets toute autre série Z californienne ? Par ailleurs, le succès du film en a fait une telle garantie de succès facile que Will Smith n'a pas trouvé mieux pour lancer la carrière de son rejeton en mai 2010. Ralph Macchio est devenu à l'époque une idole adolescente, recevant quantité de lettres enamourées de fans, mais il s'est malheureusement totalement enfermé dans ce rôle et ses suites, à tel point qu'il continue de cachetonner sur ce personnage de Daniel Larusso à presque 50 ans pour se donner l'illusion d'avoir eu une carrière - il a notamment tourné une vidéo parodique lourde en références à son succès de 1984 pour le site Funny or Die.
Reste que The Karate Kid, le seul et original, sera à jamais dans les mémoires pour ce portrait novateur et touchant de l'adolescence qu'il a proposé. Alors que les teen movies traitaient en général de la vie au lycée, de castes et de l'intégration à la microsociété lycéenne, ici, on sortait assez vite du lycée, car il était question de parler d'affirmation individuelle, qui plus est, par le sport. Avildsen a créé le sport individuel comme objet cinématographique permettant de représenter l'adolescence. Le karaté vaut moins pour les scènes de combats qu'il occasionne que pour ce qu'il montre de l'affirmation de Daniel Larusso. Et c'est en partie parce que le karaté est apparu ainsi comme la voie royale de l'affirmation de soi qu'après la sortie du film, la fréquentation des dojos a explosé, et que les arts martiaux sont entrés dans le parcours classique des adolescents des Etats-Unis et d'ailleurs. Sans doute entendaient-ils mentalement You're the Best de Joe « Bean » Esposito?
@funculturepop: pas associé avec des army pants!! - du reste, vu l'esthétique shabby-chic/hipstery de Topman, ça fait en effet sens, mais pas l'unanimité ;)
Je n'ai pas vraiment aimé le remake de 2010 meme si le rejeton de will smith sais ce battre, On ne peux pas appliquer les principe du karaté au kung fu...
@funculturepop: pas associé avec des army pants!! - du reste, vu l'esthétique shabby-chic/hipstery de Topman, ça fait en effet sens, mais pas l'unanimité ;)
Je n'ai pas vraiment aimé le remake de 2010 meme si le rejeton de will smith sais ce battre, On ne peux pas appliquer les principe du karaté au kung fu...
@funculturepop: pas associé avec des army pants!! - du reste, vu l'esthétique shabby-chic/hipstery de Topman, ça fait en effet sens, mais pas l'unanimité ;)
Je n'ai pas vraiment aimé le remake de 2010 meme si le rejeton de will smith sais ce battre, On ne peux pas appliquer les principe du karaté au kung fu...
@funculturepop: pas associé avec des army pants!! - du reste, vu l'esthétique shabby-chic/hipstery de Topman, ça fait en effet sens, mais pas l'unanimité ;)