Née Joan de Beauvoir de Havilland à Tokyo, Japon, elle est la fille cadette de Walter de Havilland, et de Lilian Augusta Ruse, ex-actrice britannique connue sous son nom de scène Lilian Fontaine, qu'il épousa en 1914. Le père, Walter, était un mandataire de brevets possédant un bureau au Japon.
Cadette de l'actrice
Olivia de Havilland, qu'elle ne voit plus depuis 1975; toutes deux étudièrent au lycée de Los Gatos et dans l'école catholique pour filles Notre Dame à Belmont, en Californie.
Les parents de Joan divorcèrent quand elle avait deux ans. Joan était une enfant maladive et développa une anémie après une rougeole et des infections de streptocoques. Sur le conseil d'un médecin, la mère de Joan emmena ses deux filles aux États-Unis où ils s'établirent à Saratoga, Californie.
Sa santé s'améliorant rapidement, elle prit des leçons de diction tout comme sa soeur. Elle était très brillante et obtint le score de 160 lors d'un test de QI quand elle avait trois ans. A quinze ans, Joan repartit au Japon et vécut deux ans avec son père.
Joan fait ses débuts sur scène dans la production sur la côte ouest de Call It A Day en 1935 et signa bientôt un contrat avec la RKO. Plusieurs années plus tard, elle apparaîtra à Broadway dans Forty Carats.
Elle débuta par un petit rôle dans No More Ladies : La Femme de sa vie co-réalisé par
George Cukor avec la resplendissante
Joan Crawford en vedette (1935) puis elle apparut dans Pour un baiser de
George Stevens avec cette fois
Katharine Hepburn dans le premier rôle. Puis elle fut choisie pour un rôle important aux côtés de
Fred Astaire (pour son premier film RKO sans
Ginger Rogers): Une Demoiselle en détresse (1937), comédie musicale de Stevens à nouveau, mais le public ne suivit pas et le film fit un flop . Elle interprète ensuite une douzaine de films, principalement des comédies romantiques avec pour partenaire
Richard Dix ou
Louis Hayward mais, par manque de réussite, son contrat n'est pas renouvelé à son expiration en 1939. Cette même année, elle tourne le célèbre Gunga Din de son mentor Stevens, film d'aventures viriles dans l'Inde du 19ème siècle qui privilégie les hommes (
Cary Grant,
Victor McLaglen, Douglas Fairbanks Jr.), et à l'opposé participe au mémorable Femmes de
George Cukor, avec une myriade d'actrices (
Norma Shearer,
Joan Crawford,
Rosalind Russell, Paulette Goddard...), preuve qu'elle est déjà une actrice qui compte à Hollywood. En 1939 toujours, elle épouse son premier mari, l'acteur britannique
Brian Aherne. Mais ce mariage ne fut pas des plus heureux.
La chance tourna un soir lors d'une réception où elle occupait la place à côté du producteur
David O. Selznick.
Selznick et Joan évoquèrent le roman Rebecca de
Daphne du Maurier, et le producteur lui demanda d'auditionner pour le rôle de l'héroïne. Elle dut passer une série de tests sur six mois, en compagnie de centaines d'autres actrices (la toute jeune
Anne Baxter par exemple), avant d'être finalement choisie pour devenir la femme oppressée de
Laurence Olivier.
Rebecca marque les débuts américains du réalisateur britannique
Alfred Hitchcock. En 1940, le film sortit en recueillant des critiques élogieuses et Joan fut nommée à l'Oscar de la meilleure actrice.
Elle ne le remporta pas cette année-là, (
Ginger Rogers le reçut pour
Kitty Foyle) mais Fontaine l'obtiendra l'année suivante pour Soupçons, à nouveau sous la direction d'Hitchcock : en épouse inquiète de
Cary Grant, jamais Joan Fontaine ne fut plus belle. C'est l'unique Oscar d'interprétation attribué à un film d'Hitchcock.
Olivia de Havilland fut la première à devenir actrice; lorsque sa soeur, Joan, voulut suivre la même voie, leur mère, qui préférait prétendument Olivia, refusa de la laisser utiliser leur nom de famille. Joan fut donc contrainte de s'inventer un nom (Joan Burfield, puis Joan Fontaine, qui était l'ancien nom de scène de sa mère).
Le biographe Charles Higham rapporte que les soeurs ont toujours entretenu une relation difficile, dès la prime enfance, lorsqu'Olivia déchirait les vêtements de sa cadette, la forçant ainsi à les recoudre. La perception de Joan voyant sa soeur comme la préférée de leur mère est pour beaucoup dans le ressentiment et leur querelle.
Olivia et Joan furent toutes deux nommées pour l'Oscar de la meilleure actrice en 1942. Joan le remporta pour son rôle dans Soupçons, (Olivia étant nommée pour Par la porte d'or). Higham écrit que Joan "se sentit coupable d'avoir gagné; étant donné son manque d'ambition de carrière..."
Higham a dépeint les événements de cette soirée, d'après lui, quand Joan se leva pour recueillir l'Oscar elle rejeta la tentative d'Olivia qui voulait la féliciter, un comportement qui la rendit à la fois offensée et embarrassée. Plusieurs années plus tard, Olivia se souviendra de cette esquive et rendra la pareille à Joan, qui l'attendait la main tendue, car Olivia avait mal pris un commentaire de Joan sur son mari de cette période-là.
Les relations entre les deux soeurs continuèrent à se détériorer après l'incident des Oscars en 1942. D'après Higham c'est la dernière paille de ce qui deviendra une brouille à vie, mais les soeurs n'ont vraiment arrêté de se parler qu'à partir de 1975.
Selon Joan, Olivia ne l'invita pas au service mémorial de leur mère récemment décédée. Olivia démentit, déclarant l'avoir invitée mais ayant essuyé un refus de Joan, trop prise pour assister à la cérémonie.
Higham prétend que Joan a aussi des relations difficiles avec ses propres filles, probablement après avoir découvert qu'elles entretenaient une relation secrète avec leur tante Olivia.
Les deux soeurs ont toujours refusé de s'exprimer publiquement sur leur querelle et leurs relations de famille dysfonctionnelle.
Sacrée star grâce aux deux films d'Hitchcock, la belle blonde enchaîne les succès dans les années 1940, elle excelle dans les mélodrames romantiques. Parmi les films marquants de cette période : Ames rebelles d'
Anatole Litvak au côté de
Tyrone Power, Tessa, la nymphe au coeur fidèle d'
Edmund Goulding (1943) avec
Charles Boyer, Jane Eyre d'après Charlotte Brontë (1944) avec
Orson Welles, Le Crime de Madame Lexton (Ivy) (1947) et Lettre d'une inconnue de
Max Ophüls d'après Stefan Zweig (1948, avec
Louis Jourdan), L'aventure vient de la mer de
Mitchell Leisen d'après Daphné du Maurier encore.
Joan retrouve en 1948 la comédie musicale avec La Valse de l'empereur, dirigée par
Billy Wilder au côté de
Bing Crosby, et le film noir avec Les Amants traqués (Kiss the Blood Off My Hands), réalisé par
Norman Foster, face à
Burt Lancaster. Par ailleurs elle brille dans la comédie, escortée par
George Brent ou
James Stewart.
Les succès au cinéma se raréfient la décennie suivante : le très sombre Born to be Bad de
Nicholas Ray avec
Robert Ryan ne reçoit pas l'accueil attendu, et ni Les Amants de Capri de
William Dieterle (où figurent
Joseph Cotten et
Françoise Rosay) en 1950 ni ses retrouvailles avec Stevens pour L'Ivresse et l'amour, drame avec
Ray Milland, ne marquent autant que ses triomphes passés. Seul de cette période Ivanhoé (1952), classique du film d'aventures moyenâgeuses, survit auprès du grand public ; cependant, même si elle occupe le haut de l'affiche avec
Robert Taylor, la beauté de la jeune et brune
Elizabeth Taylor est loin de passer inaperçue.
De la même manière,
Joan Collins est la présence sexy des Pages galantes de Boccace (1953, où Fontaine et Jourdan reforment leur couple mythique) et de Une île au soleil (1957) de
Robert Rossen - dans ce dernier, Joan Fontaine est la femme scandaleuse partagée entre
James Mason et
Harry Belafonte. Dans
Femmes coupables de
Robert Wise, l'actrice mûrissante rivalise avec les juvéniles
Jean Simmons et
Piper Laurie auprès du juvénile
Paul Newman. Promue "grande dame de l'écran" à 35 ans, Joan passe de la parodie (La Grande Nuit de Casanova de Norman Z. McLeod, en compagnie de
Bob Hope) au film d'auteur (Bigamie de et avec
Ida Lupino), tourne avec
Anthony Mann et mène la distribution de
Un certain sourire d'après Françoise Sagan. Elle s'essaie même tardivement, comme d'autres actrices de sa génération (
Yvonne De Carlo), à la science-fiction : Le Sous-marin de l'apocalypse mis en scène en 1961, avec
Walter Pidgeon pour co-vedette.
Ses deux derniers rôles marquants au cinéma, Fontaine les doit à deux vétérans :
Fritz Lang la confronte une dernière fois au film noir dans L'Invraisemblable Vérité (1956) - et à
Dana Andrews, autre référence du genre - et
Henry King lui offre ses adieux au grand écran en héroïne de
Francis Scott Fitzgerald dans Tendre est la nuit (1962), entourée par
Jennifer Jones,
Jason Robards et
Tom Ewell. Son ultime apparition en salles date de Pacte avec le diable (1966) qu'elle co-produisit.
Fontaine commence à travailler pour la télévision dès les années 50 et s'illustre aussi sur scène. Elle reçut des critiques positives à Broadway pour son rôle de Laura dans Thé et Sympathie en 1954 face à
Anthony Perkins. Dans les années 60, elle poursuit ses apparitions scéniques dans plusieurs productions, dont Private Lives, Cactus Flower et la production autrichienne The Lion in Winter. Elle apparut sporadiquement à la télévision dans les années 70 et 80 et fut nommée pour un Emmy pour le soap opera, Ryan's Hope en 1980.
Elle réside à Carmel en Californie, dans un relatif isolement.
Elle publia son autobiographie, No Bed of Roses, en 1979.
Joan Fontaine s'est marié quatre fois:
- Brian Aherne (1939 - 1945)
- William Dozier (1946 - 1951)
- Collier Young (1952 - 1961)
- Alfred Wright, Jr. (1964 - 1969), rédacteur de magazine.
Elle eut une fille, Deborah Leslie Dozier (née en 1948), de son union avec Dozier, et une autre fille, Martita, adoptée du Pérou, qui quitta le foyer.
Joan Fontaine a une étoile sur le Hollywood Walk of Fame au 1645 Vine Street.
Depuis la mort de
Katharine Hepburn en 2003, Joan Fontaine, sa soeur
Olivia de Havilland et Maureen O'Hara sont les dernières grandes stars hollywoodiennes vivantes des années 1930 et 1940, avec
Lauren Bacall pour cette dernière période.