L'interrogatoire sans culotte de Sharon Stone dans Basic Instinct
Paul Verhoeven est un réalisateur incandescent, irrévérencieux et sulfureux. Sa filmographie est traversée de fulgurances, qui mêlent les charges politiques menées de front, sans armure, aux plaisirs de l'épiderme. De Katie Tippel à Black Book, en passant par Showgirls ou La Chair et le Sang, au titre synthétique, Verhoeven a en effet toujours filmé le sexe comme un combat, et inversement. Mais c'est certainement dans Basic Instinct, réalisé en 1992 au coeur de sa période américaine, que le réalisateur hollandais représente le mieux cette ambivalence, cette relation à la fois fertile et destructrice.
Sharon Stone, suspectée du meurtre de son amant, assassiné à coups de pic à glace en plein coït, est traquée par Michael Douglas. Elle dévoile ses charmes à de nombreuses reprises au fil de l'intrigue, le plus souvent au détour d'un miroir ou d'un objectif déformant, comme pour mieux souligner l'ambiguïté du rapport sexuel, qui se révèle être davantage un lieu stratégique, une partie d'échecs mortelle, qu'un réceptacle du plaisir. En témoigne l'une des scènes les plus tendues du film, lors de laquelle Sharon Stone, au cours d'un interrogatoire, fait face à une demi-douzaine de policiers avides et les mate avec perversité, à l'aide de tous ses atouts :
Interrogatoire extrait de Basic Instinct
Sous couvert de questions anodines, c'est ici un véritable duel qui se joue entre les deux protagonistes, qui chacun leur tour vont user de stratagèmes pour dominer leur adversaire, le coincer, voire le posséder. Et c'est au coeur de cette lutte que Sharon Stone, femme fatale, abat sa carte la plus fondamentale : « Have you ever fucked on cocaine, Nick ? », demande-t-elle à Michael Douglas, soudain désarçonné. La musique s'intensifie et à peine a-t-il eu le temps de réagir que la mante religieuse croise puis décroise ses jambes, à deux reprises, laissant apparaître sous sa courte robe blanche une intimité non dissimulée. En quinze secondes Sharon Stone a gagné la bataille, et Michael Douglas passera le reste du film à tenter de la maîtriser, de la contrôler, d'assouvir ses désirs inextinguibles sans aucun succès. Avec Basic Instinct, Paul Verhoeven érige le sexe au rang de mise à mort, filme le taureau en proie à l'estocade du matador.
A noter que pour cette scène, le cinéaste a menti à la comédienne et lui a demandé d'enlever sa culotte, pour éviter une tache trop claire sur la pellicule. Ce n'est qu'en visionnant les rushes que Sharon Stone s'est rendue compte de la manoeuvre de Verhoeven. Hasard ou conséquence directe, elle n'a plus jamais joué dans un de ses films par la suite...
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mariep21 juin 2011 Voir la discussion...