Cannes 2013 : Le compte-rendu complet des films en compétition
Le festival de Cannes propose chaque année une compétition de très haut niveau international. Pour suivre au mieux l'édition 2013, cet article propose de découvrir au jour le jour des films présentés en compétition.
L'article sera mis à jour quotidiennement avec un court texte sur chacun des films en course pour la Palme d'or.
Jeune & Jolie de François Ozon
Marine Vacth, la Jeune & Jolie d'Ozon
Dialectique des rapports tarifés. Ozon s'amuse tout au long de son film à mettre en perspective un sujet déjà largement traité par le cinéma. La banalisation de la prostitution est ici permise par l'insouciance du personnage de Marine Vacth mais aussi, plus encore, par la curiosité innocente de son petit frère. On en vient presque à s'étonner des réactions d'une mère débordée par la réalité (Geraldine Pailhas qui rappelle Leslie Mann dans The Bling Ring). Ozon, en roue libre, livre un film « comme il faut », convenu mais délicat.
Synopsis : Le film dresse le portrait d'une jeune fille de 17 ans en quatre saisons et quatre chansons.
Présenté en compétition le jeudi 16 mai / Date de sortie : 21 août 2013
Heli d'Amat Escalante
Cramé. C'est peut-être le début d'un running gag. Après Post Tenebras Lux l'année dernière, Heli est ce nouveau film mexicain en compétition dont on peut se demander si son auteur (Amat Escalante) ne nous prend pas pour des imbéciles. Moins abscons que le film de Reygadas (qui est ici producteur), moins puissant visuellement aussi, ce Heli ne manque pas pour autant de mise en scène. Mais les quelques bonnes idées sont souvent avalées par les réjouissances doloristes qu'il s'impose : roulades dans le vomi, testicules flambées et exécution d'un gentil chiot. Finalement, c'est l'ambiguïté dont est teinté le film qui constitue son (maigre) intérêt. En sa moitié, Heli prend des faux airs de torture porn et on peut craindre un moment qu'il se prolonge là-dessus jusqu'au bout. Ce n'est heureusement pas le cas. Dans sa toute fin le film se découvre même des enjeux. On comprend notamment qu'il est question de reconfiguration du noyau familial et de sexualité ; un peu tard peut-être.
Synopsis : Au Mexique, la famille d'Estela, une jeune fille de 12 ans est prise dans un engrenage de violence lorsqu'elle celle-ci tombe amoureuse d'un jeune policier impliqué dans un détournement de drogue.
Présenté en compétition le jeudi 16 mai / Date de sortie : prochainement
Au palmarès : Prix de la mise en scène
Le Passé d'Asghar Farhadi
Bérénice Bejo et Tahar Rahim dans Le passé
Scènes de la vie conjugale. Certains ont vu un peu de Bergman dans ce drame familial complexe tourné en région parisienne par le réalisateur iranien d'Une Séparation et il faut avouer que dans la densité des enjeux le film s'en approche. Le Passé s'attache à déméler les conséquences de l'ingérence dans les relations intimes et permet à ses acteurs d'offrir de belles performances. Notamment Berenice Bejo et les enfants, tandis que Tahar Rahim apparait un peu effacé. Aux codes culturels et sociaux de l'Iran se substituent les rites et décors d'une banlieue parisienne sur laquelle il porte un regard assez neuf. Paradoxalement toutefois, on peine à retrouver le traitement étonnament familier de ses intrigues iranniennes et le récit parait ici plus lointain.
Synopsis : Après quatre années de séparation, Ahmad arrive à Paris depuis Téhéran, à la demande de Marie, son épouse française, pour procéder aux formalités de leur divorce. Lors de son bref séjour, Ahmad découvre la relation conflictuelle que Marie entretient avec sa fille, Lucie. Les efforts d'Ahmad pour tenter d'améliorer cette relation lèveront le voile sur un secret du passé.
Présenté en compétition le vendredi 17 mai / Date de sortie : 17 mai 2013
Au palmarès : Prix d'interprétation pour Bérénice Bejo
A Touch of Sin de Jia Zhang Ke
Il était une fois en Chine. Une fois de plus Jia Zhang Ke propose un portrait choral de la Chine contemporaine, servi par une réalisation au cordeau. Cette fois pourtant, il ajoute un ingrédient plutôt épicé avec quelques scènes d'action sidérantes. C'est bien simple, le premier segment peut évoquer Tarantino. Tant du point de vue de la mise en scène donc, que de la direction artistique on a ici affaire au premier film de la compétition pour lequel on peut parler sans ambiguïté de « grand cinéma ».
Synopsis : Dahai, mineur exaspéré par la corruption des dirigeants de son village, décide de passer à l'action. San'er, un travailleur migrant, découvre les infinies possibilités offertes par son arme à feu. Xiaoyu, hôtesse d'accueil dans un sauna, est poussée à bout par le harcèlement d'un riche client. Xiaohui passe d'un travail à un autre dans des conditions de plus en plus dégradantes. Quatre personnages, quatre provinces, un seul et même reflet de la Chine contemporaine : celui d'une société au développement économique brutal peu à peu gangrenée par la violence.
Présenté en compétition le vendredi 17 mai / Date de sortie : 1er janvier 2014
Au palmarès : Prix du scénario
Jimmy P. d'Arnaud Desplechin
Benicio del Toro et Mathieu Almaric
A l'Ouest rien de nouveau, ou presque. Si avec Jimmy P. Desplechin déménage en installant son cinéma sur les terres du western, le cinéaste continue à filmer avec un certain brio les turpitudes de l'âme. A l'image de la ligne droite tracée du doigt par Benicio Del Toro dans le film, ce Desplechin américain se veut «plain and simple» et on se surprendrait presque à regretter de le trouver à ce point apaisé. Reste une narration extrêmement riche - bien soutenue par la belle bande originale d'Howard Shore (qui avait déjà signé la musique d'Esther Kahn) - qui trouve peut-être en fluidité ce qu'elle a perdu en vitesse. On est également frappé par l'harmonie parfaite entre les deux comédiens principaux dont le physique, le débit et l'expression se complètent par opposition. Enfin, et même si elles sont relativement peu présentes à l'image, quoi qu'on les retrouve dans les plus belles scènes, les femmes sont au coeur du film. Desplechin en fait l'horizon de ses personnages ; pour le meilleur ou le pire, la cause de leurs troubles, ce qui les agite et les fige.
Synopsis : Au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale, Jimmy Picard, un Indien Blackfoot ayant combattu en France, est admis à l'hôpital militaire du Kansas, un établissement spécialisé dans les maladies du cerveau. Il souffre de nombreux troubles : vertiges, cécité temporaire, perte d'audition... En l'absence de causes physiologiques, le diagnostic qui s'impose est la schizophrénie. La direction de l'hôpital décide toutefois de prendre l'avis d'un ethnologue et psychanalyste français, spécialiste des cultures amérindiennes, Georges Devereux.
Présenté en compétition le samedi 18 mai / Date de sortie : 11 septembre 2013
Tel père, Tel fils de Kore-Eda Hirokazu
La vie est un long fleuve tranquille. S'il y a une chose qu'on ne peut pas retirer à Kore-Eda, c'est la grande humanité de ses films. Ici encore, il laisse toujours à ses personnages le temps d'évoluer et, éventuellement, de se racheter. Mais, s'il traite son sujet avec une grande délicatesse, le film manque vraiment trop d'idées pour trouver sa consistance. On retrouve certaines forces de son cinéma et en particulier la direction des enfants, toujours aussi merveilleuse (même s'il a cette année de la concurrence avec Le Passé de Farhadi), mais le questionnement de l'éducation et de la paternité déjà plusieurs fois traité par ses films peut ici apparaitre simpliste.
Synopsis : Ryoata, un architecte obsédé par la réussite professionnelle, forme avec sa jeune épouse et leur fils de 6 ans une famille idéale. Tous ses repères volent en éclats quand la maternité de l'hôpital où est né leur enfant leur apprend que deux nourrissons ont été échangés à la naissance : le garçon qu'il a élevé n'est pas le sien et leur fils biologique a grandi dans un milieu plus modeste...
Présenté en compétition le samedi 18 mai / Date de sortie : prochainement
Au palmarès : Prix du Jury
Borgman d'Alex van Warmerdam
L'invasion des profanateurs. Le nouveau film de Van Warmerdam est sans doute l'un des plus singuliers de la compétition tant il est délicat de dire de quoi il parle. Un homme aidé d'étranges complices s'infiltre dans un foyer bourgeois et parasite petit à petit leur quotidien. Le cinéaste accentue la bizzarerie de son long-métrage en multipliant les détails inexpliqués. Mais le rapprochement entre les éléments semi-fantastiques et la satire sociale (pour être sûr d'être embauché comme jardinier, le personnage principal envoie avant lui des candidats émigrés tous refoulés par le père de famille) permet de porter sur le film de multiples lectures. Borgman peut également être vu comme une réflexion sur le genre, une sorte de pastiche. Une curiosité pas facile à cerner mais qui offre un certain dépaysement cinématographique.
Synopsis : Camiel Borgman surgit dans les rues tranquilles d'une banlieue cossue, pour sonner à la porte d'une famille bourgeoise. Qui est-il ? Un rêve, un démon, une allégorie, ou l'incarnation bien réelle de nos peurs ?
Présenté en compétition le dimanche 19 mai / Date de sortie : 20 novembre 2013
Inside Llewyn Davis d'Ethan et Joel Coen
Carey Mulligan et Justin Timberlake à l'affiche du prochain film des frères Coen
Chacun cherche son chat. La veine rétro des Coen avait donné des beaux films comme Le Grand Saut et Miller's Crossing, mais aussi ce qui reste sans doute leur chef d'oeuvre (avec Fargo pour le versant contemporain) : Barton Fink, d'ailleurs récompensé par la Palme d'or en 1991. Ici on retrouve un personnage d'artiste frustré qui recherche sa voie. Il s'agit d'un chanteur de folk incappable de percer qui squatte les canapés de ses amis new-yorkais. Ce looser né, qui pour son plus grand malheur à eu également la mauvaise idée d'être ambitieux, ne peut se résoudre à se contenter «d'exister». Le film va ainsi à l'image de la musique qui l'accompagne : délicat et torturé. Pour autant, il est difficile de retrouver ici l'ambition formelle de Barton Fink, ni-même celle de A Serious Man. Ce Coen-là est modeste et il semblerait presque que ce soit son sujet. Rester maladivement dans l'ombre (le film bénéficie d'une photographie en clair-obscur magnifique), voilà à quoi est condamné Llewyn Davis (incarné par l'excellent Oscar Isaac) - un personnage inspiré de Dave Van Ronk, l'un des premiers mentors de Bob Dylan. Mais Inside Llewyn Davis est aussi un film long en bouche auquel on continue de penser bien après la projection. Avec un peu de recul, l'une des références les plus nettes du film serait la série Girls de Lena Dunham (dont on retrouve notamment les acteurs Alex Karpovsky et Adam Driver). Les folkeux des années 60 ressemblant d'assez près aux new-yorkais branchés d'aujourd'hui, on pourrait presque dire que les Coen ont ici signé un « film hipster d'époque ».
Synopsis : En 1961, le jeune chanteur folk Llewyn Davis est à la croisée des chemins. Alors qu'un hiver rigoureux sévit sur New York, le jeune homme, sa guitare à la main, lutte pour gagner sa vie comme musicien, et affronte des obstacles qui semblent insurmontables - à commencer par ceux qu'il se crée lui-même. Il ne survit que grâce à l'aide que lui apportent des amis ou des inconnus, en acceptant n'importe quel petit boulot. Des cafés du Village à un club désert de Chicago, ses mésaventures le conduisent jusqu'à une audition pour le géant de la musique Bud Grossman - avant de retourner là d'où il vient...
Présenté en compétition le dimanche 19 mai / Date de sortie : 6 novembre 2013
Au palmarès : Grand Prix du Jury
Wara No Tate de Takashi Miike
Battle pas vraiment royale. Que peut bien faire ce film en compétition ? C'est la question que ce sont posé pas mal de festivaliers après des projections plutôt chahutées. Fondé sur un concept simple et efficace : un violeur pédophile est mis à prix par le grand-père milliardaire de sa dernière victime, et doit être escorté par la police jusqu'à Tokyo. Si l'efficacité de l'idée de départ ne fait pas de doute - dès les premières séquences du film (d'ailleurs distribué par la Warner) on a le sentiment qu'un remake américain risque de ne pas tarder - son développement est en revanche excessivement faible. Toute l'intensité dramatique repose en effet sur les tiraillements intérieurs des deux personnages choisis pour assurer l'escorte immédiate du violeur. En mettant en scène l'absurdité de la défense d'un criminel contre la volonté du peuple, le film se donne par ailleurs un vernis pro peine de mort assez douteux auquel il faut ajouter un sous-texte vaseux sur la corruption et la cupidité de la société japonaise. On ne reprochera pas forcément à Miike, dont on sait la production pléthorique, d'avoir commis ce film à l'évidence trop faible pour la compétition cannoise, mais on regrettera qu'il l'ait livré avec des scènes d'action aussi poussives.
Synopsis : « Tuez cet homme et vous toucherez 1 milliard de yens de récompense ». Avec cette publicité parue dans tous les journaux japonais, le milliardaire Ninagawa met à prix la tête de Kiyomaru, l'assassin présumé de sa petite-fille. Des millions d'ennemis potentiels vont alors se dresser sur la route des policiers chargés d'escorter Kiyomaru jusqu'à Tokyo, transformant leur périple en une poursuite infernale et entraînant le spectateur au coeur d'un western urbain à l'issue incertaine.
Présenté en compétition le lundi 20 mai / Date de sortie : prochainement
Un château en Italie de Valeria Bruni Tedeschi
Louis Garrel et Valeria Bruni Tedeschi
Nombril. Autofiction aux petits oignons. Ceux qui suivent en détails la vie de Valeria Bruni-Tedeschi et la carrière de Louis Garrel riront double aux facétieuses situations du film inspirées de la réalité. Il y a en tous cas, dans la pure mise en scène de comédie, un talent et un rythme qui s'étaient étiolés chez d'autres adeptes du genre, comme par exemple Julie Delpy. Mais si la cinéaste et actrice nous embarque à l'énergie dans le comique, la mayonnaise ne prend pas aussi bien dans le tragique.
Synopsis : Lorsque Louise rencontre Nathan, ses rêves ressurgissent. C'est aussi l'histoire de son frère malade et de leur mère, d'un destin: celui d'une grande famille de la bourgeoisie industrielle italienne. L'histoire d'une famille qui se désagrège, d'un monde qui se termine et d'un amour qui commence.
Présenté en compétition le lundi 20 mai / Date de sortie : 30 octobre 2013
Ma vie avec Liberace de Steven Soderbergh
Matt Damon, l'amour de Liberace
Piano, piano. Investir un genre et le tordre légèrement est l'une des préocuppations récurrentes de Steven Soderbergh. Ici, il déforme le biopic pour faire de la vie extravagante, mais relativement annecdotique, de Liberace un traité sur le couple. A ce petit jeu, l'alchimie entre Michael Douglas et Matt Damon est parfaite et permet d'exposer avec une grande précision les enjeux de leur relation. L'exhubérance de Liberace présente par ailleurs l'avantage d'étirer à l'extrême la représentation des sentiments et des rapports entre les deux amants, rendant ainsi le propos extrêmement lisible et universel.
Synopsis : Avant Elvis, Elton John et Madonna, il y a eu Liberace. Pianiste virtuose, artiste exubérant, bête de scène et des plateaux télévisés. Liberace affectionnait la démesure et cultivait l'excès, sur scène et hors scène. Un jour de l'été 1977, le bel et jeune Scott Thorson pénétra dans sa loge et, malgré la différence d'âge et de milieu social, les deux hommes entamèrent une liaison secrète qui allait durer cinq ans.
Présenté en compétition le mardi 21 mai / Date de sortie : 18 septembre 2013
La Grande Bellezza de Paolo Sorrentino
Rance. Les Coen nous donnaient à voir le destin d'un jeune artiste inquiété par l'échec de sa carrière, Sorrentino s'intéresse lui au bilan d'un vieil écrivain qui doit la sienne à un succès, un seul. Le type en question n'a écrit qu'un roman avant de devenir une espèce de chroniqueur mondain. Sorrentino en profite pour filmer Rome comme on l'a rarement vu, au travers de la communauté de jet-setters ambiance bunga bunga dont l'écrivain en question fait partie. Des scènes de fêtes rocambolesques croisent quelques séquences religieuses grotesques et, englué dans la laideur, le personnage principal est en quête de beauté.
Synopsis : C'est l'été à Rome et Jep Gamberdella a soixante-cinq ans. Auteur dans sa jeunesse d'un seul roman, "L'appareil humain", il n'a plus rien écrit depuis. Il est devenu un très grand journaliste qui fréquente la haute société romaine et les mondanités. Sa vie est une succession de rendez-vous et de fêtes excentriques dont il est le protagoniste. Jep, cynique, désabusé et souffrant, assiste à la crise d'une société qui semble avoir transformé les hommes en monstres. Seul le souvenir de l'amour innocent de sa jeunesse sortira Jep de la résignation qu'il semble avoir choisie comme existence.
Présenté en compétition le mardi 21 mai / Date de sortie : 22 mai 2013
Only God Forgives de Nicolas Winding Refn
Only God Forgives est la deuxième collaboration entre Ryan Gosling et Nicolas Winding Refn
Thaï. Sur les terres de Weerasethakul, ce Ryan Gosling, filmé à nouveau par Nicolas Winding Refn, ne semble pas forcément se souvenir de ses vies antérieures. La perspective de voir un Drive 2 dans Only God Forgives est (heureusement ?) dissipée dès les premières minutes. Ce film de genre thailandais, car à vrai dire c'est de cela qu'il s'agit, opte pour une voie assez radicale et extrêmement épurée. Ce qui est en jeu ici c'est le rapport à la mère et à la masculinité. Là où Drive travaillait à la construction du héros, Only God Forgives organise une remise en question de la virilité. Si le récit tend vers le vide absolu, le travail des cadres et la photo d'excellente facture donnent un intérêt particulier à cette fable symboliste. A la croisée d'inspirations très diverses, le film ne s'élève jamais vraiment, mais propose une expérience finalement moins prétentieuse et plus aboutie que, par exemple, le dernier film de Gaspard Noe.
Synopsis : À Bangkok, Julian, qui a fui la justice américaine, dirige un club de boxe thaïlandaise servant de couverture à son trafic de drogue. Sa mère, chef d'une vaste organisation criminelle, débarque des États-Unis afin de rapatrier le corps de son fils préféré, Billy : le frère de Julian vient en effet de se faire tuer pour avoir sauvagement massacré une jeune prostituée. Ivre de rage et de vengeance, elle exige de Julian la tête des meurtriers. Julian devra alors affronter Chang, un étrange policier à la retraite, adulé par les autres flics.
Présenté en compétition le mercredi 22 mai / Date de sortie : 22 mai 2013
Grigris de Mahamat-Saleh Haroun
Une certaine idée de la souplesse. Film de gangster subsaharien, jolie romance ou film de danse, le nouveau film de Mahamat-Saleh Haroun tourne autour des genres avec une certaine aisance. La grande clarté de son scénario, faussement simpliste, permet en effet de passer de l'un à l'autre dans une grande fluidité. Le film est d'ailleurs à l'image de la démarche de son acteur principal. Le flamboyant Soulémane Démé, handicapé par une jambe à moitié paralysée, montre à la fois une certaine maladresse dans ses déplacements et une aisance extrême dans ses mouvements (en particulier quand il danse).
Synopsis : Alors que sa jambe paralysée devrait l'exclure de tout, Grigris, 25 ans, se rêve en danseur. Un défi. Mais son rêve se brise lorsque son oncle tombe gravement malade. Pour le sauver, il décide de travailler pour des trafiquants d'essence...
Présenté en compétition le mercredi 22 mai / Date de sortie : 10 juillet 2013
Nebraska d'Alexander Payne
La malédiction veut que je loupe chaque année un film de la compétition. Cette année, c'est tombé sur Alexander Payne.
Synopsis : Woody Grant, un père de famille alcoolique est persuadé d'avoir gagné le gros lot à un improbable tirage au sort par correspondance et décide de rejoindre le Nebraska pour y recevoir son gain. Sa famille, inquiète de ce qu'elle perçoit comme un début de sénilité, envisage de le placer en maison de retraite, mais un de ses deux fils se décide à l'emmener en voiture. En chemin, le vieil homme retrouve tout son passé et rencontre des amis, de la famille et de vieilles connaissances à qui il doit de l'argent.
Présenté en compétition le jeudi 23 mai / Date de sortie : prochainement
Au palmarès : Prix d'interprétation pour Bruce Dern
La vie d'Adèle d'Abdellatif Kechiche
Adèle Exarchopoulos et Léa Seydoux
Amour. Le titre de la dernière Palme d'Or conviendrait à merveille au nouveau film de Kéchiche, dont on pourrait résumer l'histoire à un "girl meets girl". Mais l'incroyable réussite du film tient en particulier à deux choses. D'abord à la prestation époustouflante des deux actrices ; entre lesquelles le film a su créer un magnétisme bluffant. Ensuite, à la narration de Kéchiche. Dans ses trois premiers films, les histoires étaient relativement ramassées dans leurs durées ce qui permettait d'assortir le naturalisme des séquences d'un récit en quasi-temps réel. Avec Vénus Noire en revanche, il expérimentait pour la première fois la dilatation de son récit sur plusieurs années. La Vie d'Adèle repose ainsi sur une construction faite de longues séquences en temps réel connectées par des ellipses plus ou moins espacées. Le rythme est par ailleurs soutenu par la répétition de certains motifs (scènes de sexe, scène de classe, repas, scènes de séduction, séquences de groupes...) qui permettent d'indiquer, par leurs subtiles variations, l'écoulement du temps et l'évolution des personnages. Cette forme narrative explique également la nature des scènes de sexe, extrêmement crues et beaucoup plus longues que les standards du cinéma, même d'auteur. Comme le sexe est au coeur de la relation passionnelle qui unit Adèle et Emma, il était indispensable que sa valeur à l'écran soit comparable au reste de ce qui caractérise les personnages. Kéchiche a l'habitude d'étirer toutes ses séquences jusqu'au point de rupture, c'est ainsi que ses films semblent si vivants. Il ne pouvait donc faire d'exception pour les scènes de sexe. Au cours du film, le personnage d'Adèle (joué par une Adèle Exarchopoulos stratosphérique) gagne progressivement en assurance et en maturité avant d'évoluer encore très nettement dans le dernier tiers du film. Le long-métrage a été présenté à Cannes sans générique de fin et le titre complété par la mention "Chapitre 1 et 2", laisse penser (Kéchiche l'a d'ailleurs confirmé en conférence de presse) qu'il pourrait y avoir une suite. En attendant il serait très décevant de ne pas le voir figurer au palmarès.
Synopsis : A 15 ans, Adèle a deux certitudes : elle est un fille, et une fille, ça sort avec des garçons. Le jour où elle aperçoit le bleu des cheveux d'Emma sur la grande place, elle sent que sa vie va changer. Seule face à ses questions d'adolescente, elle transforme son regard sur soi et le regard des autres sur elle. Dans son amour fusionnel avec Emma, elle s'accomplit en tant que femme, en tant qu'adulte. Mais Adèle ne sait pas faire la paix, ni avec ses parents, ne avec ce monde plein de morales absurdes, ni avec elle-même.
Présenté en compétition le jeudi 23 mai / Date de sortie : 9 octobre 2013
Au palmarès : Palme d'Or
The Immigrant de James Gray
Joaquin Phoenix et Marion Cotillard
La Porte du paradis. James Gray ouvre son nouveau film sur une Statue de la Liberté fantômatique. L'image est parfaite et immédiate. Incarnation de la terre promise pour les immigrants arrivant à New York, la splendeur de la sculpture est vite flétrie par la réalité de cette prison d'accueil qu'est Ellis Island. C'est l'histoire du film, le goût amer du rêve américain pour Ewa (Marion Cotillard) qui va, littéralement, devoir se donner corps et âme pour entrer avec sa soeur sur le territoire. Mais on peut également trouver d'autres raisonnances à ce premier plan en faisant un petit détour par l'histoire du cinéma. Il évoque d'abord inévitablement Le Parrain (2e Partie en l'ocurrence), trilogie culte pour le cinéaste et véritable matrice de ses films. Pour The Immigrant, Gray l'admet d'ailleurs lui-même « Nous avons vite réalisé qu'il était impossible de filmer une rue du Lower East Side dans les années 20 sans qu'un spectateur nous dise "Hey, ça rappelle le Parrain 2". ». Mais cette image inaugurale peut également évoquer un autre classique revu pendant ce festival 2013 : Sueurs Froides d'Alfred Hitchcock et la scène où Judy réapparait après s'être arrangé les cheveux à la manière de Madeleine. La superposition des deux références donne une addition simple. Il est donc d'une part question d'une revenante ; Cotillard traverse le film comme un fantôme jugé pour ses actes (on l'accuse au début du film d'être une « femme de petite vertue ») qui va tenter de passer le Styx sur la barque de Charon. Et d'autre part d'une reproduction ; elle sera plus tard grimmée en Statue de la Liberté pour sa première apparition dans le cabaret tenu par Joaquin Phoenix. Tel le Scottie de Vertigo, Gray cherche à refaire pour ramener au monde. Dans un geste manièriste il exhume ainsi à la fois l'histoire de sa grand-mère dont le film est inspiré et, une nouvelle fois, la trilogie de Coppola.
Synopsis : En 1921, Ewa et sa soeur Magda quittent leur Pologne natale pour New York. Arrivées à Ellis Island, Magda, atteinte de tuberculose, est placée en quarantaine. Ewa, seule et désemparée, tombe dans les filets de Bruno, un souteneur sans scrupules. Pour sauver sa soeur, elle est prête à tous les sacrifices et se livre, résignée, à la prostitution. L'arrivée d'Orlando, illusionniste et cousin de Bruno, lui redonne confiance et l'espoir de jours meilleurs. Mais c'est sans compter sur la jalousie de Bruno.
Présenté en compétition le vendredi 24 mai / Date de sortie : 27 novembre 2013
Michael Kohlhaas d'Arnaud des Pallières
Rien que pour vos chevaux. Arnaud des Pallières qu'on pouvait associer à un cinéma plus expérimental propose avec Michael Kohlhaas le portrait d'un homme qui ne transige pas avec son code de l'honneur. C'est d'ailleurs à ce niveau là que se situe la principale faiblesse du film. Le système de valeur du personnage reste particulièrement hermétique et on peine vraiment à s'identifier à ce Mads Mikkelsen aussi ténébreux que bucolique, tant ses motivations nous semblent étrangères et infondées. Dans la catégorie cheap et théorique, le film de des Pallières peut notamment évoquer Les Chants de Mandrin (avec lequel il partage Jacques Nolot), mais le dispositif ostensiblement théatral de Rabah Ameur-Zaïmèche est ici remplacé par une sobriété formelle en forme de cache misère. Le vent souffle fort comme pour masquer d'éventuels défauts dans la prise de son, l'action est reléguée hors-champ à un point rarement vu au cinéma (carreaux d'arbalète tirés à travers les portes, bataille filmée au loin...), et la diction en français des acteurs (la crème du cinéma d'auteur européen) laisse parfois à désirer. In fine, on aurait presque préféré voir une version encore plus radicale du film, qui n'aurait cadré - comme dans le très beau dernier plan - rien d'autre que le visage de Mikkelsen.
Synopsis : Au XVIe siècle, quelque part dans les Cévennes, Michael Kohlhaas, un prospère marchand de chevaux mène une vie familiale aisée et heureuse. Victime d'une injustice, cet homme pieux et intègre lève une armée et met les villes à sac pour rétablir son droit.
Présenté en compétition le vendredi 24 mai / Date de sortie : 14 août 2013
La Vénus à la fourrure de Roman Polanski
Cactus rime avec Phallus. Après Carnage, Polanski donne à nouveau dans le huis-clos théatral. Ici le sujet rejoint même la forme puisque le film raconte l'audition d'une actrice (Emmanuelle Seigner) par un metteur en scène au bout du rouleau (Mathieu Amalric). Le délire méta est poussé au maximum car la pièce est commentée par les deux acteurs en même temps qu'ils la jouent. La musique de Desplat accentue chaque effet et le surjeu intentionnel d'Emmanuelle Seigner permet de distinguer facilement son personnage d'actrice vulgaire de celui (en fait ceux) qu'elle joue dans la pièce. On pourrait dire pour se moquer qu'elle imite sa soeur Mathilde, dire qu'elle la parodie serait plus juste. Extrêmement théorique, le film propose un commentaire pas inintéressant sur le sexe, le genre et le travestissement, mais la forme et le ton du film de Polanski transpire un mépris bizarre dont on n'arrive pas vraiment à déterminer la cible.
Synopsis : Seul dans un théâtre parisien après une journée passée à auditionner des comédiennes, Thomas se lamente au téléphone sur la piètre performance des candidates. Pas une n'a l'envergure requise pour tenir le rôle principal et il se prépare à partir lorsque Vanda surgit, véritable tourbillon d'énergie aussi débridée que délurée. Vanda incarne tout ce que Thomas déteste : vulgaire et écervelée, elle ne reculerait devant rien pour obtenir le rôle. Un peu contraint et forcé, Thomas la laisse tenter sa chance et c'est avec stupéfaction qu'il voit Vanda se métamorphoser. Non seulement elle s'est procuré des accessoires et des costumes, mais elle comprend parfaitement le personnage. Alors que l'audition se prolonge et redouble d'intensité, l'attraction de Thomas se mue en obsession.
Présenté en compétition le samedi 25 mai / Date de sortie : 13 novembre 2013
Only Lovers Left Alive de Jim Jarmusch
Tom Hiddleston et Tilda Swinton, vampires amoureux de Only Lovers Left Alive
So 70s. Pur film d'ambiance, Only Lovers Left Alive accompagne dans son spleen un vieux couple de vampires dandys. Tom Hiddleston et Tilda Swinton portent les lunettes noires comme personne et il peut y avoir un plaisir fétichiste à découvrir leur collection de guitares vintages et à savourer la playlist concoctée par Jarmusch. Oui, mais... Oui, mais le film ne s'élève jamais au dessus du confort pépère de sa scène d'ouverture. Un tourne-disque filmé de dessus et la caméra prise dans une rotation sans fin cadre, également depuis le plafond, les deux personnages alternativement, apathiques et exangues après leur dose l'enjeu du film sera pour ces morts-vivants de trouver une nouvelle vitalité. Il semble ici que Jim ait tourné pour tourner. Tant mieux pour lui.
Synopsis : Dans la solitude romantique de Détroit et de Tanger, un vampire musicien underground, profondément déprimé par la tournure qu'ont pris les activités humaines, retrouve son amante. Leur histoire d'amour dure au moins depuis plusieurs siècles, mais leur idylle débauchée est bientôt perturbée par l'arrivée de la petite soeur de l'amante, une jeune femme aussi extravagante qu'incontrôlable.
Présenté en compétition le samedi 25 mai / Date de sortie : prochainement
Image © Warner Bros, Mars Distribution, Memento Films Productions, Wild Bunch, StudioCanal, SBS Films, HBO, Front Row Filmed Entertainment
Ca veut dire quoi "inaccessible" ? Plus de place ? Annulée ? T'avais pas la bonne accred ? Si tu le vois, faudra que tu racontes si y a vraiment un rapport avec Dave Van Ronk ou pas, au fond c'est surtout ça qui m'intrigue.