La musique de rue à Hollywood

Rap et RnB : Les meilleurs morceaux originaux au cinéma

Music Box | Par David Honnorat, Florent Dufour | Le 11 mars 2015 à 07h49

Récompensé il y a quelques semaines par l'Oscar de la meilleure chanson originale, Glory le morceau de Common (feat. John Legend) qu'on entend sur le générique de fin de Selma rejoint un glorieux palmarès au sein duquel les titres Hip-Hop se comptent seulement sur les doigts d'une demi-main. Qu'à cela ne tienne, il y a de quoi, en fouillant un peu, se régaler les oreilles avec des morceaux Rap ou RnB spécialement composés pour des films. Découvrez notre sélection dans une playlist concoctée par nos soins.

Les évènements relatés par Selma tiennent dans un court laps de temps de l'été 1964, mais l'un des enjeux du film est de rappeler à quel point les combats d'alors sont encore d'actualité. Le gospel délicat de John Legend qui accompagne les premiers noms du générique est ainsi rompu par le flow de Common qui, sur un beat tout ce qu'il y a de plus contemporain, fait explicitement le saut dans le temps, entre la ville de Selma hier et celle de Ferguson aujourd'hui : « That's why Rosa sat on a bus, That's why we walked to Ferguson with our hands up ».

Public Enemy – Fight The Power

Do The Right Thing de Spike Lee. Do The Right Thing, c’est une véritable cocotte-minute dans laquelle Spike Lee laisse éclater toute sa rage et sa fureur : à Brooklyn, en plein été caniculaire, la tension monte entre les différentes communautés, jusqu'à l'explosion finale. Et quoi de mieux pour illustrer ça que du Public Enemy ? Le groupe porté par Chuck D et Flavor Flav portait alors très bien son nom, lui qui effrayait l’Amérique blanche par ses morceaux violents et contestataires. Tout ce qui plait à Spike Lee, qui leur demande donc d’écrire le morceau sur lequel s'ouvre le film. Résultat : un hymne à la fierté noire (dans lequel Elvis et John Wayne y sont un peu maltraités) qui donne envie de brandir le poing.

Et surtout, un morceau qui donne lieu à l’un des génériques les plus célèbres de toute l’œuvre de Lee, voire de tout le cinéma US des années 80 : Rosie Perez se déhanchant pendant près de quatre minutes sur le flow agressif de Chuck D, en jupe rouge ou en tenue de boxeuse. Simple, et pourtant on aura rarement fait aussi puissant. : « Cause I'm black and I'm proud / I'm ready and hyped, plus I'm amped / Most of my heroes don’t appear on no stamps ».

James Brown & 2Pac – Unchained (The Payback / Untouchable)

Mashup de Claudio Cueni pour Django Unchained de Quentin Tarantino. Magie du cinéma et magie du recyclage à la Quentin Tarantino : pour illustrer son western/revenge movie Django Unchained, le réalisateur américain est parvenu à mélanger deux artistes décédés pour créer un morceau original : James Brown et 2Pac. Rien que ça ! Et c’est grâce à Claudio Cueni (ancien collaborateur de 2Pac) que le miracle a lieu, en mixant l’instru funky et cuivrée de James Brown au flow chaloupé du rapper californien. Et pour conclure le morceau, c’est Django himself qu’on croirait entendre jubiler : « Expect me like you expect Jesus to come back / Expect me, I’m comin', hahaha ».

Eminem – Lose Yourself

8 Mile de Curtis Hanson. Faux biopic mais vrai bon film, 8 Mile de Curtis Hanson est autant consacré à Eminem qu'à la ville de Detroit. La légende veut qu'Eminem ait composé ce morceau sur un coin de table, et d’une seule traite, durant le tournage. Ce qui explique sans doute la rage du morceau, dans lequel Slim Shady raconte son destin de petit Blanc tout frêle qui, une fois sur scène, déchaine les foules au son d’un beat bien lourd et d’un flow aiguisé comme une lame de rasoir. Avec un message d'espoir adressé à tous les habitants d'une ville sinistrée : « You only get one shot / do not miss your chance to blow / This opportunity comes once in a lifetime yo ».

R. Kelly – The World's Greatest

Ali de Michael Mann. Si on peut éventuellement discuter du caractère hagiographique du Ali de Michael Mann, la chanson de R. Kelly, elle, ne fait pas dans le détail. The World's Greatest fait d'Ali « une montagne, un arbre gigantesque, un vent puissant, un fleuve ». Cette légende de l'histoire du sport, qu'on avait vu quelques années avant trembler au moment d'allumer la flamme Olympique à Atlanta en 96 - la faute à la maladie de Parkinson - apparait dans le refrain (qui résonne avec le climax du film) comme le symbole absolu de l'espoir : « I'm that little bit of hope / When my back's against the ropes / I can feel it / I'm the worlds greatest ». Can you feel it ?

Public Enemy – He Got Game

He Got Game de Spike Lee. Dix ans après la réussite coup de poing de Do The Right Thing, Spike Lee refait appel à Public Enemy pour écrire la musique de He Got Game, son drame familial sur fond de basketball new-yorkais. Les envolées orchestrales d’Aaron Copland s’occupent de l’aspect americana du film, quand Public Enemy se charge de traduire en mots le parcours de Jesus Shuttlesworth, jeune des ghettos rêvant de devenir un joueur NBA (interprété par Ray Allen, véritable joueur NBA et accessoirement l’un des meilleurs shooteurs de l’histoire de ce sport). Et c’est sur un sample de « For What It’s Worth » de Buffalo Springfield que Chuck D balance son texte acéré, prouvant qu’en 10 ans le rappeur n’a rien perdu de sa virulence, et entrecoupé de la voix suave de Stephen Stills entonnant le refrain entêtant : « It's time to stop / Children what's that sound / Everybody look what's going down »

Run-DMC – Ghostbusters

S.O.S. Fantômes 2 d’Ivan Reitman. De S.O.S. Fantômes, tout le monde connaît le célébrissime morceau de Ray Parker Jr (« I ain’t afraid of no ghosts ! »). Ce que l’on sait moins en revanche, c’est que pour la suite réalisée en 1988 (S.O.S. Fantômes 2, donc), Run-DMC s’était chargé de faire une sorte de reprise de la chanson originale, dans une version encore plus rappée. Un sympathique morceau qui aura même droit à un vidéoclip tout aussi sympathique, dans lequel on peut voir les membres du groupe, déguisés en chasseurs de fantômes, faire un peu n’importe quoi dans une ambiance bon enfant et devant une foule en délire : « All by myself, with no one around / Did not understand a hand comin out the ground / I knew it wasn't mine, it was somebody else ! ».

Will Smith – Men in Black

Men in Black de Barry Sonnenfeld. Enorme carton de l’été 1997, Men in Black de Barry Sonnenfeld avait aussi fait son petit effet sur les charts et les discothèques du monde entier, avec le morceau éponyme signé par le Fresh Prince himself, Will Smith. La basse slappée du Forget Me Nots de Patrice Rushen, le refrain langoureusement chanté, Will Smith qui danse avec un extra-terrestre dans le clip… rien à dire, tout y est : ce titre, c’est la coolitude incarnée. Alors à tous les DJs en herbe qui nous lisent : même en 2015, n’hésitez pas à balancer ce titre en soirées pour faire remuer les têtes et les guiboles. Succès garanti. « So go witcha life, forget that Roswell crap / Show love to the black suit, cause that's the Men in...That's the Men in... ». 

Method Man – Batman Forever

Batman Forever de Joel Schumacher. Dans le domaine des cartons estivaux qui se sont éparpillés en morceaux de rap, on continue avec celui de Method Man pour Batman Forever, le troisième épisode de la saga initiée par Tim Burton et assassinée dans de grandes gerbes de couleurs fluos par Joel Schumacher. Un nanar dans lequel Jim Carrey fait strictement n’importe quoi dans le rôle de Edward Nygma, mais un n’importe quoi qui inspirera malgré tout à l’un des membres les plus influents du Wu-Tang Clan un morceau intitulé Riddler. Produit par l’encore plus influent RZA, Method Man y pose son flow caverneux sur un beat reprenant un peu mollement le thème du Batman des années 60 composé par Neal Hefti (le fameux « nin-nin-nin-nin-nin-nin-nin-nin-nin-Batmaaaaaaaan »). Alors certes le résultat donne un peu l’impression d’avoir été torché en 15 minutes chrono autour d’un bon spliff par un RZA d’habitude plus inspiré, mais ça s'écoute tout de même bien tranquillement. « Take a journey through the mind of a Riddler »

Ice-T – Colors

Colors de Dennis Hopper.  Avant d’être un comédien qui cachetonne dans bon nombre de DTV et de séries TV policières, Ice-T était un mec qui comptait dans le milieu du rap, et plus particulièrement celui de la West Coast. Et lorsque Dennis Hopper réalise en 1988 son polar Colors, où il est notamment question de la guerre des gangs entre les Bloods et les Creeps, il se tourne tout naturellement vers « Thé-Glacé » pour écrire un morceau aussi nerveux et dénonciateur que son film. L'instru n'a rien de fantastique, mais les paroles sont d'une incroyable noirceur : « Listen to me man / no matter whatcha do don't ever join a gang / You don't wanna be in it man / You're just gonna end up in a mix of dead freinds and time in jail ».


Tout ceci (plus quelques bonus) est à retrouver dans notre playlist :

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23 commentaires
  • jenanaipa
    commentaire modéré J'en profite pour faire la promo d'une liste qui est honteusement passée inaperçue : http://www.vodkaster...ui-dechirent/1287195
    12 mars 2015 Voir la discussion...
  • itachi
    commentaire modéré Le Prisoners of love de Millie Jackson avec Shurik'n et le Life goes on de Cunnie Williams étaient fabulous !
    12 mars 2015 Voir la discussion...
  • jenanaipa
    commentaire modéré @itachi Frissons.
    12 mars 2015 Voir la discussion...
  • ProfilSupprime
    commentaire modéré Je rajoute le film hommage à Notorious big, dans la salle de ciné, je n'arrêtais pas de hocher de la tête. Et la bo, du film la Haine.
    21 novembre 2016 Voir la discussion...
  • Fujee
    commentaire modéré @Graziella97 Y'a que les beastie en hip hop dans la haine non ?
    12 mars 2015 Voir la discussion...
  • MMaestracci
    commentaire modéré Amusant de mettre Men in Black et The Payback et de dire ensuite que le morceau de Method Man (qui s'appelle The Riddler) semble avoir été bâclé
    12 mars 2015 Voir la discussion...
  • ProfilSupprime
    commentaire modéré @fujee oui, bien vu. Et j'adore également la compile de rappeur francais de l'époque, expression direkt, sté bien avant Diam's, le ministère amer... s'inspirant du scénario du film.
    21 novembre 2016 Voir la discussion...
  • jenanaipa
    commentaire modéré @Graziella97 Comment j'ai pu l'oublier celui-là, il a tourné en boucle pendant un long moment, spécialement le "Dealer pour survivre" d'Express di. et le morceaux des sages po.
    12 mars 2015 Voir la discussion...
  • ProfilSupprime
    commentaire modéré @jenaipa "Job, après job. J'ai pointé l'ANPE. Je n'ai pas le profil type pour rentrer chez eux. Plus d'espoir et beaucoup trop de Haine..." Ministere Amer et son "Sacrifier de poulet" J'ai vécu en cité et cette compile, c'était l'hymne national du moment. Je m'égare mais je n'ai pas pu m'empêcher :)
    21 novembre 2016 Voir la discussion...
  • jenanaipa
    commentaire modéré @Graziella97 Je viens aussi d'un quartier, un hymne aussi fort que "La roue tourne".
    12 mars 2015 Voir la discussion...
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